L’Expansion.com avec AFP – publié le 09/07/2012 à 16:47, mis à jour à 19:25
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La France a pour la première fois bénéficié d’un taux d’intérêt négatif à l’occasion lundi d’une émission d’obligations à court terme d’un montant de près de 6 milliards d’euros. Un privilège jusqu’ici réservé à des pays comme l’Allemagne.
L’état de grâce se poursuit pour François Hollande et la France sur le marché de la dette . On peut même dire qu’il s’amplifie. Pour la première fois de son histoire, Paris a en effet emprunté lundi près de 6 milliards d’euros à court terme à des taux négatifs, ce qui illustre l’attrait de la dette française auprès des investisseurs, a annoncé l’Agence France Trésor.
La France rejoint ainsi le club fermé des pays européens qui bénéficient de taux gratuits, voire négatifs, comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou le Danemark. Cela signifie schématiquement que les investisseurs acceptent de payer pour prêter de l’argent à la France.
Paris a emprunté 3,917 milliards d’euros à un taux de -0,005% pour des titres de dette à échéance le 11 octobre. Elle a également levé 1,993 milliard d’euros à un taux de -0,006% pour des placements à échéance le 27 décembre. Dans la mesure où les rendements évoluent à l’inverse des cours, cette faiblesse des taux signifie que jamais le prix des obligations n’a été aussi élevé. Autrement dit, la demande bat des records.
Paris bénéficie en premier lieu des difficultés d’autres pays européens comme l’Italie et surtout l’Espagne, dont les taux ont repassé lundi le cap alarmant de 7%. A l’inverse, « cela prouve qu’en ces temps de turbulences financières, la France fait figure de pays sûr », note Patrick Jacq, stratégiste obligataire pour BNP Paribas. Le pays n’est pas en récession, contrairement à plusieurs pays d’Europe du sud, même si la croissance est très faible. Le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a annoncé le 3 juillet lors de son discours de politique générale que le gouvernement anticipait une croissance de 0,3% pour 2012 et d’environ 1,2% pour 2013.
Pour Jean-François Robin, stratégiste chez Natixis, la baisse des taux d’emprunt concédés par Paris est amenée à se poursuivre. Les investisseurs professionnels (fonds de pension, investisseurs institutionnels…) « sont obligés de détenir dans leur portefeuille des actifs notés +triple A+ (la meilleure note possible) par les agences de notation. Or ces placements ne sont plus si nombreux », note-t-il.
La politique budgétaire reste crédible…
La dette française est encore notée triple A par deux des trois grandes agences de notation (Moody’s et Fitch). Elle est donc considérée comme telle par les opérateurs. Par ailleurs, « le gouvernement semble pour l’instant vouloir tenir ses objectifs budgétaires, ce qui rassure les marchés », souligne M. Jacq. Paris compte ramener le déficit public à 4,5% du produit intérieur brut en 2012 et à 3% en 2013. L’objectif est de revenir à l’équilibre budgétaire en 2017. Pour respecter cet engagement, le gouvernement a annoncé la semaine dernière 7 milliards d’euros d’impôts supplémentaires en 2012. « Attention au moindre dérapage, il sera sanctionné immédiatement par un envol des taux d’emprunt », avertit M. Jacq. La situation de la France reste donc toujours fragile.
… mais le spread avec l’Allemagne est toujours élevé
Pour preuve, la prime de risque payée par le pays par rapport à l’Allemagne (spread) s’inscrivait au-dessus des 100 points de base (10 points de pourcentage) sur le marché obligataire, là où s’échangent les titres de dette déjà émis par les Etats. « Paris n’apporte tout de même pas les mêmes garanties que Berlin qui table sur un déficit de seulement 0,9% cette année », rappelle M. Robin.