Emmanuel Todd explique pourquoi Sarkozy peut être battu en 2012 !

03 Janvier 2010 Par M. CHALLALI

Emmanuel Todd a livré au Monde une passionnante analyse de la situation engendrée par l’instauration du grand débat sur l’identité nationale.

Todd est démographe et historien et c’est un fait connaisseur de l’état psychologique, sociologique et social du pays. L’entretien qu’il a accordé au Monde devrait être lu et relu par tous les opposants à l’actuel président de la République, car il contient tous instruments d’analyse nécessaires à a construction d’une stratégie qui peut mener la gauche au pouvoir en 2012.

 

1/ le Sarkozysme et le débat sur l’identité nationale:

« Tous les sondages d’opinion le montrent : les thématiques de l’immigration, de l’islam sont en chute libre et sont passées largement derrière les inquiétudes économiques.

La réalité de la France est qu’elle est en train de réussir son processus d’intégration. Les populations d’origine musulmane de France sont globalement les plus laïcisées et les plus intégrées d’Europe, grâce à un taux élevé de mariages mixtes. Pour moi, le signe de cet apaisement est précisément l’effondrement du Front national. »

2/ le Sarkozysme et l’immigration:

« Je suis plutôt optimiste : quand on va vraiment au fond des choses et dans la durée, le tempérament égalitaire des Français fait qu’ils n’en ont rien à foutre des questions de couleur et d’origine ethnique ou religieuse ! »

 

3/ le Sarkozysme et les musulmans:

« Je me demande même si la stratégie de confrontation avec les pays musulmans – comme en Afghanistan ou sur l’Iran – n’est pas pour lui (NDLR: Nicolas Sarkozy) un élément du jeu intérieur. Peut-être que les relations entre les Hauts-de-Seine et la Seine-Saint-Denis, c’est déjà pour lui de la politique extérieure ? On peut se poser la question…

Si vous êtes au pouvoir et que vous n’arrivez à rien sur le plan économique, la recherche de boucs émissaires à tout prix devient comme une seconde nature. Comme un réflexe conditionné. Mais quand on est confronté à un pouvoir qui active les tensions entre les catégories de citoyens français, on est quand même forcé de penser à la recherche de boucs émissaires telle qu’elle a été pratiquée avant-guerre. »

4/ le Sarkosysme à l’épreuve de l’Histoire:

« Il ne faut pas faire de confusion, mais on est quand même contraint de faire des comparaisons avec les extrêmes droites d’avant-guerre. Il y a toutes sortes de comportements qui sont nouveaux mais qui renvoient au passé. L’Etat se mettant à ce point au service du capital, c’est le fascisme. L’anti-intellectualisme, la haine du système d’enseignement, la chasse au nombre de profs, c’est aussi dans l’histoire du fascisme. De même que la capacité à dire tout et son contraire, cette caractéristique du sarkozysme. »

5/ le Sarkozysme tel qu’en lui même:

« Je n’ose plus dire une droite de gouvernement. Ce n’est plus la droite, ce n’est pas juste la droite… Extrême droite, ultra-droite ? C’est quelque chose d’autre. Je n’ai pas de mot. Je pense de plus en plus que le sarkozysme est une pathologie sociale et relève d’une analyse durkheimienne – en termes d’anomie, de désintégration religieuse, de suicide – autant que d’une analyse marxiste – en termes de classes, avec des concepts de capital-socialisme ou d’émergence oligarchique.

Mais on est en train d’entrer dans un système social et politique nouveau, qui correspond à une dérive vers la droite du système, dont certains traits rappellent la montée au pouvoir de l’extrême droite en Europe. »

Il y aurait quinze pages de conclusions politiques (et électorales) à rédiger à partir de cette analyse. N’en retenons que la principale.

1/ La stratégie électorale de l’actuel président est basée sur des données sociales et sociologiques (et par conséquent politiques) erronées, ce qui est la cause de l’effet boomerang du débat sur l’identité nationale. L’actuel pouvoir est déconnecté de la réalité française et prépare 2012 selon les canons désormais obsolètes de 2007.

2/ La nature de ce pouvoir de « droite » est originale car d’essence purement réactionnaire. Pour la première fois depuis 1945, 2012 verra l’affrontement des républicains héritiers de 1789 (de tous horizons, de droite à gauche) et d’un pouvoir sortant d’inspiration extrême ou ultra droitière, ultime dégénérescence du gaullisme, modèle autoritaire régulièrement testé par les Français depuis 1789 (Charles X, Napoléon III, Boulanger, Pétain) et qu’ils finissent TOUJOURS par rejeter.

En 1995, Jacques Chirac s’était inspiré des analyses de Todd relatives à la fracture sociale afin de définir sa stratégie de campagne électorale présidentielle. Qui le fera en 2012?

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