Sécheresse aux USA et en Russie : le système alimentaire mondial fragilisé

La sécheresse aux Etats-Unis et en Russie, gros pays exportateurs, entraîne une flambée des prix des céréales dans le monde faisant planer la menace des émeutes de la faim de 2008. Alors que la famine sévit déjà en Afrique au Sahel, la spéculation sur les marchés agricoles est de nouveau pointée.

La sécheresse historique que connaissent les Etats-Unis depuis juin s’est aggravée dans la « Corn Belt » (Middle West), la « ceinture » des Etats producteurs de maïs situés dans le centre et centre-est du pays  (Illinois, Iowa, Missouri, Indiana, Arkansas, Kansas et Nebraska) mais aussi une partie du Wyoming (ouest) et du Dakota du Sud (centre-ouest), a annoncé le 26 juillet dans un communiqué Brian Fuchs, climatologue au Centre américain de surveillance de la sécheresse.

Plus de la moitié des USA touchée par la sécheresse

Cette sécheresse la plus grave depuis 1956 frappe désormais 60% des Etats Unis – premier producteur mondial de soja et de maïs et premier exportateur de blé – et pourrait durer encore jusqu’en octobre, estime le service météorologique américain (NOAA). En seulement une semaine, les zones touchées dans neuf Etats du Midwest par une sécheresse classée « extrême ou exceptionnelle » ont quasi-triplé, a précisé Brian Fuchs. Or, les trois quarts du maïs et du soja américains sont produits dans ces Etats.

Si de faibles précipitations sont attendues cet été, les conditions de forte chaleur ne devraient pas s’améliorer à court terme. « Les prévisions météorologiques annoncent la poursuite des conditions chaudes et sèches jusqu’à la fin du mois d’août. Ces conditions pourraient persister à l’automne », a prévenu Brian Fuchs.   Plus de la moitié de la superficie des Etats-Unis est en état de sécheresse modérée ou plus importante, « un record pour la quatrième semaine consécutive en 12 ans d’existence du programme de suivi de la sécheresse », a souligné le Centre de surveillance. Pas moins de 26 Etats ont déjà été déclarés le 18 juillet en état de catastrophe naturelle par le secrétaire américain à l’agriculture, Tom Vilsack. Quatorze de ces États dont ceux du Middle West, outre le Colorado et l’Oklahoma (sud du pays) en proie à des incendies, seraient touchés de manière exceptionnelle.

Pics des prix des céréales et inflation

Cette situation de sécheresse est des plus inquiétante au niveau local et mondial. Les prévisions de récoltes aux USA pour la campagne 2012/2013, déjà revue à la baisse par le département américain de l’Agriculture – pour le maïs (-46 millions de tonnes) et le blé (-6,7 millions) – pèse sur la flambée des prix des matières premières agricoles. La canicule actuelle qui a déjà des effets dévastateurs sur les agriculteurs impactera encore l’an prochain les consommateurs finaux qui pourraient payer en 2013 leurs provisions 3 à 4 % plus cher, selon les dernières estimations du département américain de l’agriculture. « Les effets commencent à se faire ressentir au niveau des fermes. Mais cela peut prendre entre deux et douze mois pour se diffuser dans toute la chaîne. Il y aura donc sûrement des conséquences (sur les prix) dès l’automne dans les épiceries ou les restaurants, puis plus tard dans l’année et jusqu’en 2013″, a expliqué à l’AFP Ephraim Leibtag, du service de recherche économique.

La canicule impactant le leader mondial pousse depuis mi-juin les prix des céréales vers des niveaux jamais atteints à la bourse de Chicago et des marchés internationaux. Des prix qui risquent encore de gonfler d’ici fin 2012. En un mois, les prix du maïs – la céréale la plus échangée – du blé et du soja se sont ainsi  envolés de 30 voire 50%, atteignant ou dépassant leur niveau de 2007-2008 présageant un retour funeste des « émeutes de la faim » en Afrique. « Avec des conditions climatiques défavorables, les perspectives d’une amélioration de l’offre de maïs s’amenuisent« , a prévenu le 5 juillet l’Organisation onusienne pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Les spécialistes estiment que le seuil des 10 dollars pourrait être dépassé prochainement à Chicago concernant le boisseau de maïs clôturé vendredi 20 juillet à 7,43 dollars, soit une hausse hebdomadaire de 10,5%. Le boisseau de blé à même échéance a fini à 7,91 dollars (+7,1% en une semaine). Le boisseau de soja a lui terminé à 16,19 dollars (+7,1%).

Sur le marché européen Euronext, la situation n’est guère meilleure : la hausse du cours du blé est elle de 32,4%. Ainsi, le contrat de blé tendre plafonnait à 269,75 euros la tonne le 20 juillet tandis que les cours du maïs atteignaient 252,25 euros. La flambée de ces prix est également liée à la sécheresse que connaît aussi la Russie depuis quelques mois dans la région de la Volga (sud-ouest), du sud de l’Oural et à l’ouest de la Sibérie alors que le pays est le troisième exportateur mondial de céréales. La production de blé, sa première culture à l’exportation, est principalement destinée au Moyen-Orient et à l’Afrique faisant planer la menace de crise alimentaire mondiale de 2008…

Vers un retour des émeutes de la faim en Afrique ?

En dépit des cours du riz qui demeurent actuellement « stables », selon la FAO, « les prix des céréales sont aujourd’hui plus élevés qu’en 2008 au moment des émeutes de la faim », a alerté l’ONG humanitaire Oxfam France en rappelant que  »18 millions de personnes sont déjà sous-alimentées dans le Sahel » en Afrique de l’Ouest, en raison également de la sécheresse qui s’étend dans la région depuis début 2012 limitant les récoltes et du conflit au Mali qui a déplacé plus de 300.000 personnes. Les prix alimentaires sont très élevés à travers la région, ce qui complique encore plus l’accès à la nourriture pour les familles démunies. « La production céréalière est en dessous de la moyenne des 5 dernières années en Mauritanie, au Tchad, au Niger et au Burkina Faso », a expliqué le Programme alimentaire mondial (PAM).

« La hausse actuelle des prix est une catastrophe pour les pays d’Afrique de l’Ouest déjà dans une situation désastreuse », a prévenu Malek Triki, porte-parole de l’organisation. Environ 1,6 million de personnes « auront besoin d’une assistance alimentaire » en 2013 au Zimbabwe frappé également de mauvaises récoltes céréalières, selon un rapport du PAM publié le 27 juillet. Quant à la Somalie (Corne d’Afrique), un an après l’état de famine décrété par l’ONU en juillet 2011 dans plusieurs régions et « six mois de crise », la situation « reste critique » et « la poursuite de l’aide est vitale pour préserver la sécurité alimentaire » du pays, a déclaré le 20 juillet la FAO.

La fin de la spéculation en faveur des agrocarburants, l’arlésienne

Avec des cours des céréales qui explosent, les exportations de denrées nécessaires vers ces pays vulnérables pourraient à terme être compromises. Le problème de volatilité des prix des matières agricoles et ses conséquences sur les crises alimentaires n’est pas nouveau et pourtant il perdure depuis 2007. « La situation alimentaire est tellement tendue qu’il suffit de n’importe quel aléa dans un grand pays producteur pour que tout bascule et que tout s’emballe. Nous n’avons pas réglé le problème et, pour ne rien arranger, la spéculation est toujours là« , a déclaré à l’AFP Clara Jamart d’Oxfam France.

L’ONG Oxfam et la FAO n’ont pourtant cessé depuis de répéter l’impact de la spéculation « excessive » sur les marchés alimentaires mondiaux pour encourager la production d’agrocarburants de première génération, aux dépens des besoins des populations. « En Europe comme aux Etats-Unis, une part croissante de la production agricole est destinée au marché énergétique, via les agrocarburants. 40% du maïs américain est ainsi aujourd’hui destiné à la production d’agrocarburant. Cette politique entraîne une tension de plus en plus forte sur l’offre alimentaire et tire les prix mondiaux des produits alimentaires vers des sommets. Dans ces conditions, les chocs climatiques se multipliant dans les grands pays céréaliers (Etats-Unis, Ukraine, Russie…), les conséquences sont désastreuses et mettent en péril le droit à l’alimentation de millions de personnes », a souligné dans un communiqué Clara Jamart.

Oxfam France a de nouveau appelé l’Union européenne et les Etats-Unis à « mettre fin aux politiques de quotas d’incorporation d’agrocarburants dans les carburants traditionnels, ainsi qu’aux politiques fiscales » de soutien. Dans un rapport paru en juillet 2011, le groupe d’experts de la FAO sur la sécurité alimentaire demandait également aux gouvernements  »d’abolir leurs objectifs de production » et  »de supprimer les subventions ». La taxation des agrocarburants pourrait également  »devenir une solution nécessaire pour maintenir un minimum de stabilité sur le marché international des aliments », préconisait la FAO.

G20 : le Forum de réaction rapide bientôt mobilisé

Aux côtés des experts de la FAO, l’ONG Oxfam exhorte aussi les gouvernements à enrayer la spéculation via la régulation des marchés agricoles. Lors du G20 agricole de juin 2011 tenu à Paris à l’initiative de la France (second exportateur mondial de blé), les vingt plus grandes économies – qui représentent à elles seules 85% de la production mondiale de céréales et de soja – avaient trouvé un accord sur un plan d’action pour lutter contre la volatilité des prix agricoles et la faim. La création d’un Forum de réaction rapide avait été décidée avec pour mission de promouvoir « la cohérence et la coordination politiques en temps de crise ».

« La forte augmentation des prix des céréales et du soja devient une préoccupation majeure au plan mondial. La situation actuelle mérite vigilance et prudence : vigilance pour suivre l’évolution des marchés mais aussi prudence pour ne pas alimenter les mouvements spéculatifs », a alerté le 28 juillet dans un communiqué le ministre français de l’Agriculture Stéphane Le Foll qui préside le système d’information sur les marchés agricoles (AMIS) et le Forum de réaction rapide mis en place par le G20. En cas « d’aggravation de la situation aux États-Unis et en Russie et de dégradation de la situation des marchés », le Forum de réaction rapide composé des principaux pays producteurs « pourrait se prononcer d’une part sur les actions à encourager afin de soulager les tensions, d’autre part sur celles à éviter pour ne pas les accentuer », a annoncé le ministère. Stéphane Le Foll pourrait prochainement convoquer une réunion informelle du Forum de réaction rapide « si la situation l’impose », ajoute-t-il.

Rachida Boughriet

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« CHANGER LA VIE » OU LE PLUS DIFFICILE À IMAGINER, par Annie Le Brun

18 août 2012 par Paul Jorion

Billet invité.

A prendre connaissance du dernier « Temps qu’il fait » et de l’état des lieux qu’il révèle, comment ne pas être saisi autant par la gravité de la situation que par l’ampleur du pari fait sur ce qui n’a peut-être pas commencé mais qui serait pourtant en train de s’inventer ici, là, maintenant, ailleurs, en dehors des chemins balisés, que ce soit dans la solitude d’une adolescence ou à travers la solidarité informelle et néanmoins de plus en plus réelle de ceux qui refusent ce monde ?

De cette certitude que tout se tient, dépend, en effet, l’acuité du regard mais aussi la détermination à ne pas accepter l’inacceptable. Et ne le verrait-on pas à cause de la complexité de nos sociétés à laquelle il est justement fait allusion, oui, il y a un rapport entre l’affaire de l’extradition de Julian Assange et la fusillade de New York. Comme ce n’est pas sans lien avec le rapport qu’il y a entre le massacre des mineurs d’Afrique du Sud et les questions de régulateurs qui inquiètent aujourd’hui la banque Standard Chartered. Mais comme il y a aussi un rapport de tout cela avec la révolte et la condamnation des Pussy Riot aujourd’hui en Russie. Où qu’on se tourne, voilà que l’inacceptable commence à être perçu comme tel mais pas par les mêmes et pas de la même façon.

Ainsi, que ces trois filles, belles de leur insolence, aient eu le courage de s’en prendre, en toute connaissance de cause, au pouvoir et à l’église russes réunies aura été un feu de joie dans la grisaille de cet hiver 2012. Il faut voir la vidéo de leur intervention du 21 février dernier dans la cathédrale moscovite du Christ-Sauveur « haut lieu du renouveau orthodoxe en Russie », où, après leur prière à la vierge Marie pour « chasser Poutine », l’honneur du mâle en question se trouve d’abord défendu, avant l’arrivée de la police, par des sortes de sœurs converses, complétement affolées devant quatre jeunes diables déchaînés, en cagoules et collants bariolés. Et il me paraît très significatif que, contrairement à un certain nombre de jeunes gens et vraisemblablement au nom d’un sérieux politique décontenancé par un mélange d’humour et de radicalité, on n’aura pas mesuré l’enjeu de cette affaire, à savoir, comme le souligne un de leurs amis, l’artiste Oleg Koulik, que ces filles se retrouvent en prison, « parce que le pouvoir ne peut pas admettre qu’on critique l’Église, la seule institution qui, dans le cas d’une révolution, se lèvera pour sa défense ».

Pareillement, il ne me paraît pas indifférent que ces jeunes féministes, comme j’avais rêvé qu’on le fût il y a trente cinq ans, ont été condamnées à deux ans de camp par une juge. Comme il n’est pas indifférent qu’au même moment elles étaient soutenues par une splendide fille qui, torse nu et en signe de solidarité, aura abattu une croix à la tronçonneuse en quelques minutes. Comme il est encore moins indifférent qu’elles aient purement et simplement rigolé, à la lecture des attendus de leur condamnation.

En fait, féministes, écologistes, militantes de la cause homosexuelle, liées à des collectifs d’artistes contestataires …., si Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samoutsevitch et Maria Alekhina sont coupables, c’est d’être RÉVOLTÉES, moins en tant qu’artistes qu’à vouloir, semble-t-il, « changer la vie », vraiment. Et c’est peut-être cela qui est ici difficile à imaginer, quand la plupart de nos artistes, champions de la subversion subventionnée se livrent à tous les détournements et recyclages possibles, pour en fin de compte chacun trouver sa place dans l’entreprise de neutralisation en cours. À l’inverse, on ne peut qu’être impressionné par la façon dont ces Pussy riot se seront réappropriées l’insurrection Punk, pour lui redonner la charge de révolte dont le marché du disque des années soixante-dix avait su immédiatement la dépouiller.

Et c’est sans doute pourquoi, après les avoir accusées d’« hooliganisme », on les aura finalement convaincues de « vandalisme » et d’« incitation à la haine religieuse », pour dépolitiser un propos qui ne se laisse pas réduire à telle ou telle idéologie. Dans ces cas-là, l’aberration des chefs d’accusation est toujours proportionnelle à l’inquiétude suscitée : il n’y a pas loin de « l’hooliganisme » au « cosmopolitisme » et le flou de la formulation cache toujours une partie de la « bête immonde. » De toute façon, la résonance internationale du procès est un signe. Quelque chose de cette révolte demande à être entendu.

Peu importe que telle ou telle vedette médiatique se retrouve à soutenir ces jeunes femmes. Pour ma part, je ne peux que m’en réjouir, au moment où le processus de domestication généralisée s’accélère, à voir les grands moyens adoptés pour réinjecter, par exemple à l’occasion des Jeux Olympiques, les valeurs d’asservissement que sont la famille, la patrie et la religion, celles-ci bien sûr présentées sous de nouveaux emballages.

Ce sont là autant de signes contradictoires que non seulement les structures de ce monde sont en train de lâcher mais aussi que peu à peu les choses finissent par apparaître à leur scandaleuse lumière, pour provoquer, comme en pointillé, ici, là, le refus de continuer à participer de ce jeu-là.

J’ai dit ailleurs que si la servitude est contagieuse, la liberté l’est aussi. Nous en sommes à ce point d’équilibre instable, où tout peut basculer d’un côté ou de l’autre. D’où l’importance de repérer tous les signes et nous ne serons jamais trop pour tenter de discerner ce qui advient. C’est pourquoi il me déplairait qu’on fasse fi de l’insaisissable jeunesse de cette révolte venant de l’Est. Pensez aux Provos, pensez aux Hippies, aux « aventuristes » de 68… il y aura toujours l’insolente beauté de ce qui commence. Aussi, quand bien même « en matière de révolte, aucun de nous ne doit avoir besoin d’ancêtres », il se pourrait que tout débute avec le « retour du refoulé », mais ailleurs et autrement. Comme si chaque insurrection était riche de tous les rêves précédents encore à venir, c’est-à-dire comme si, à chaque fois, il s’agissait de jouer le Grand Jeu.

Il faut peut-être le savoir pour commencer à voir.

 

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Contribution générale “Réaliser le changement”

Notre contribution s’inscrit dans un processus européen historique qui appelle des réponses politiques nouvelles. L’élection puis l’action de François Hollande ont d’ores et déjà modifié le cours de la construction européenne, le congrès du PS français ne peut plus tout à fait se restreindre à l’hexagone. Ce qui se joue dans la réussite de la gauche en France concerne l’Europe entière. Le Congrès de à Toulouse du Parti socialiste intéresse au premier chef nos partis frères. Nous avons donc souhaité élargir la rédaction de notre texte à la contribution de nos camarades du SPD dont les dirigeants suivants s’associent à l’appel public franco-allemand qui introduit notre contribution au 23e Congrès du PS. Notre objectif partagé est de réaliser le changement en Europe.

Appel signé par des députés du PS et des députés du SPD

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vendredi 20 juillet 2012

Contribution générale GPS 2012, signons et faisons signer !

La contribution militante du GPS : une orientation pour réussir le changement
Nous devons impérativement échapper à l’austérité et vaincre le chômage de masse pour proposer une alternative crédible à la crise. La contribution générale du GPS soutient les 15 mesures d’urgence du collectif citoyen Roosevelt2012 et propose un diagnostic et des solutions concrètes pour s’orienter vers un modèle de développement équitable et durable.
Signons la contribution générale du GPS et faisons signer (nous pouvons signer plusieurs contributions) autour de nous dans notre section et notre fédération.
Le Parti socialiste doit engager les réformes cruciales à l’économie du pays et à sa prospérité sociale. Avec le congrès de Toulouse, nous avons l’occasion de devenir la force de proposition militante indispensable pour que la politique du gouvernement puisse mener à bien le changement attendu par tous les Français.
Le texte complet de la contribution du GPS est à votre disposition en ligne ici ou dans la colonne de gauche. D’autres contributions sont aussi disponibles en compléments d’information. Pour un téléchargement : une fois sur le document, cliquez sur « File » puis « Download » en bas du menu déroulant. Rejoignez notre groupe sur la Coopol, ainsi que notre page Facebook. Amitiés socialistes, GPS
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L’édito « homophobe et nauséabond » de Ouest-France qui ne passe pas

L’édito « homophobe et nauséabond » de Ouest-France qui ne passe pas
Olivier ROTH | Journaliste et rédacteur en chef adjoint

Un couple s’embrasse lors de la Gay Pride à Paris, le 30 juin 2012 (FRED DUFOUR/AFP)

Dans moins d’un an, les homosexuels pourront se marier en France, qui deviendra ainsi le huitième pays européen à autoriser leur union, sept ans après la très catholique Espagne. La future loi sur l’égalité des couples, dont le vote est fixé au printemps 2013, attise déjà les passions et les réactions hostiles des défenseurs de la famille, déterminés à faire entendre leur voix.

Une prière polémique
Le 15 août, une prière rédigée par le cardinal André Vingt-Trois, président de la conférence des évêques de France, sera lue dans chaque paroisse. Celle-ci insiste sur l’importance de la famille traditionnelle et s’oppose implicitement au mariage pour tous et à l’homoparentalité.

Samedi, l’éditorial paru dans Ouest France signé François-Régis Hutin (dont il est l’actuel PDG), qui titrait « Prière, mariage homosexuel et euthanasie », a ébranlé la communauté LGBT (lesbiennes, gays, bi et trans), indignée par un texte relayant telles quelles les positions de l’Eglise sur le mariage civil.

Ce n’est pas la première fois que le journal de référence de l’Ouest se fait épingler pour ses prises de positions ouvertement familialistes (ou parentalistes). Le 1er juillet, la publication d’un édito intitulé « Des repères stables pour surmonter la crise », rédigé par Jeanne-Emmanuelle Hutin (qui n’est autre que la fille de F.R. Hutin) avait défrayé la chronique en affirmant que les revendications des LGBT autour du mariage et de l’adoption pourraient engendrer des « bouleversements beaucoup plus profonds de la société, dont les conséquences anthropologiques n’ont pas été étudiées ».

Malgré l’abondance des études sur l’homoparentalité, un phénomène qui concernerait entre 25 000 et 45 000 enfants sur le sol français, la journaliste conclut : « Les citoyens n’ont donc pas toutes les cartes en main pour forger leur opinion. » Mais n’est-ce pas le rôle d’un éditorialiste que de donner à ses lecteurs les clefs pour comprendre le monde contemporain ?

Ceci n’est pas une déclaration de guerre… mais d’amour !

Avant de poursuivre, quelques clarifications sont de mise. Il ne s’agit pas ici de tirer à boulets rouges sur nos éminents confrères, et il n’est pas question non plus de mettre sur le même plan le travail de toute une équipe et les errements de quelques-uns.

Si un tel sujet mérite l’attention, c’est d’abord parce qu’il a fait réagir des acteurs locaux comme le Centre gay lesbien bi et trans (Cglbt) de Rennes, choqué de voir l’argumentaire de l’Eglise repris point par point par François-Régis Hutin, qui invoque la liberté d’expression pour justifier son billet partisan. Extraits :

« […] On peut se demander quelles sont les raisons de la revendication du mariage par les homosexuels. […] La formule du Pacs n’a-t-elle pas été élaborée justement pour garantir, à bon droit, un minimum de sécurité dans la relation de personnes qui, homosexuelles ou non, désirent vivre ensemble ? On ne voit pas bien ce que le mariage apporterait en plus. Par contre, on voit bien que la notion même de mariage serait encore plus dévaluée et même privée de son sens profond qui est, croyait-on jusqu’à présent, d’assurer dans de meilleures conditions la prolongation de la vie de la société en garantissant une certaine sécurité, notamment aux femmes et aux enfants, qu’ainsi l’homme ne peut abandonner au gré de ses désirs. […]

On le voit, ces questions sont fondamentales car elles touchent le fondement même de la société, c’est-à-dire ce pacte social qui règle de fait et de droit les rapports entre ses membres. Ces questions ont déjà été traitées récemment à fond par des assemblées parlementaires à la suite de larges consultations et concertations. Pourquoi y revenir aujourd’hui ? Notre pays, en proie déjà à de nombreuses et si graves difficultés, a-t-il vraiment besoin de se voir divisé sur de telles questions ? On sait parfaitement qu’elles résonnent au plus profond des consciences et qu’une fracture provoquée à ce niveau pourrait avoir de considérables et irrémédiables conséquences. »

« Ce genre d’horreurs va se multiplier »

« Homophobe », « rétrograde », « nauséabond »… Le Cglbt de Rennes n’a pas de mots assez durs pour exprimer sa colère face à ce texte qui condense selon lui les stéréotypes les plus éculés sur l’ouverture du mariage aux couples du même sexe.

Dans un billet publié à chaud sur Internet, les militants rennais pro-égalité se fendent d’une lettre ouverte au sieur Hutin, présenté comme « loin de toute réalité » lorsqu’il défend « l’idée que parentalité doit rimer avec hétérosexualité ».

Quant à savoir pourquoi les homosexuels ne se contentent pas du Pacs, leur réponse est pour le moins cinglante :

« On veut les mêmes droits que tout le monde, y compris celui de divorcer. Le mariage, […] c’est juste une manière encore très puissante de gueuler au monde entier que l’on aime une personne à la folie. Le Pacs, excusez du peu, mais ça ne veut pas tellement dire cela. […] Laissez-nous clamer notre amour avec confettis, cérémonial, témoins, frous-frous, et un “Oui, je veux”. »

Pour Erwann Le Hô, président du Cglbt de Rennes, « ce genre d’horreurs va se multiplier d’ici cet automne, avec le début des travaux parlementaires ». L’édito de Ouest-France n’a pas surpris le jeune homme, habitué aux rapports conflictuels avec la presse et certains groupes politiques :

« La marche des fiertés, par exemple, n’est suivie que depuis deux ou trois ans. Avant, c’était une photo, une brève, c’est tout, mais maintenant que plusieurs milliers de personnes descendent dans la rue à cette occasion, ils ne pouvaient plus nous ignorer. »

Le militant se souvient aussi du jour où la subvention à son association a été votée au conseil municipal :

« L’élu d’opposition Bruno Chavanat [UMP, ndlr] était d’accord pour le financement, mais il avait rappelé que cela ne revenait pas à soutenir le droit au mariage revendiqué par le Cglbt ».

D’après Erwann Le Hô, « il se plante complètement, de plus en plus de sympathisants et d’élus de droite sont favorables à l’égalité des droits, mais ils le cachent pour des raisons électorales, qui n’ont plus lieu d’être ».

L’adoption par des couples homosexuels est encore loin de faire consensus mais la question du mariage, dans la mesure où elle ne concerne que des adultes majeurs et vaccinés, commence à être largement acceptée, notamment chez les jeunes générations. Selon le président du Cglbt, cela vaut aussi bien pour l’Eglise catholique elle-même :

« La position officielle du Vatican, c’est d’accueillir, d’écouter les homosexuels, tout en condamnent l’acte sexuel, et l’acte d’amour. Ils prônent l’abstinence comme solution, mais il y a beaucoup de personnes progressistes au sein de l’Eglise, qui savent que cette position est intenable. »

Mais Erwann Le Hô a bon espoir de voir un jour le bout du tunnel :

« Les autorités catholiques ont réussi à ouvrir de nombreux débats et à faire des avancées considérables sur des sujets de société, alors pourquoi pas sur le mariage ? »

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L’actualité de la crise : QUE VONT-ILS ENCORE NOUS INVENTER ? par François Leclerc

14 août 2012 par François Leclerc |

Billet invité.

La cause était entendue et le contrat est désormais rempli, l’Europe toute entière entre cet été en récession. Seuls ceux qui affectent encore de croire à un miracle peuvent s’en déclarer surpris pour s’accrocher aux dixièmes de pour-cent de croissance qu’ils croient pouvoir préserver. Pour combien de temps ?

Pour couper court aux fadaises de ceux qui ne veulent y voir que les imperfections de la construction européenne – pour mieux justifier leurs plans qui vont l’enfoncer davantage dans la récession – c’est toute l’économie occidentale qui est touchée, et par ricochet celle des pays émergents dont la croissance repose sur leurs marchés désormais en berne. Pire, le pronostic est qu’à la récession succèdera la déflation. La vérité n’est pas bonne à avouer : il n’y a pas une région du monde pour tirer les autres d’affaire. C’est ce qui fait toute la différence avec les crises précédentes qui n’étaient que régionales.

Que faut-il encore attendre de nos apprentis sorciers ? Qu’ils nous sortent une nouvelle théorie des cycles pour justifier qu’après ces trente dernières années de capitalisme financier triomphant plusieurs décennies de désendettement et de récession l’accompagnant vont malencontreusement leur succéder, et qu’il faut en prendre son parti ? Sans même qu’ils soient certains que la déflation ne va pas s’installer, l’exemple japonais étant là pour montrer que si l’on sait quand on y rentre, on ne sait jamais quand on va pouvoir en sortir… Car ce qu’il y a de bien avec les cycles, c’est qu’après la pluie survient le beau temps, et que tout recommence comme avant ! Ni vu, ni connu !

Il a été tenté dans un premier temps de mettre en avant l’énormité de l’endettement public, assorti de la nécessité de vite le résorber, pour mieux masquer par divers artifices celui du privé, qui le vaut bien, pour lequel la digestion se passe également mal. Certes, tout à son opacité, le système financier privé dissimule son endettement chronique mieux que les États, mais leur échafaudage commun ne retrouve toujours pas son équilibre.

Les subprimes américains n’ont pas été une dérive sur laquelle il serait possible de revenir, une exception qui ne sera pas renouvelée : ils ont éclairé la double nature d’un système fait d’extrême sophistication et de grande fragilité. Tout sera fait pour ne pas le reconnaître : l’économie, dans son ensemble, ne peut plus supporter le poids d’un système financier devenu hypertrophié au fil des décennies. La conséquence logique, inévitable, est pourtant qu’il va falloir en réduire la taille et lui réassigner ses missions.

Pour éviter de parvenir à cette conclusion, on tente de prendre son temps pour atterrir en plaquant l’avion au sol. Mais la trajectoire disponible rend l’exercice périlleux. L’économie entre irrésistiblement en récession, réduisant d’autant la portance du système financier, celui-ci n’ayant pas de réserve de puissance et contenant les modestes tentatives de régulation qui l’exposent à de nouvelles sautes de vent de travers… (la métaphore aura été filée jusqu’au bout).

La crise continue de recéler en elle-même la dynamique de sa poursuite. Quel paradoxe pour un système qui était présenté comme indépassable, stade ultime du développement de la société et, n’ayons pas peur des mots, de l’Humanité ! Ce n’est pas sans appréhension ni sans vertige que les pages blanches qui suivent vont être remplies…

Le droit d’inventaire va pouvoir alimenter celui d’inventer.

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Fabius et Védrine s’étonnent des propos de Sarkozy sur la Syrie

9 août 2012 à 07:39          (Mis à jour: 15:08)

Laurent Fabius.

Laurent Fabius. (Photo Regis Duvignau. Reuter)

Le communiqué de l’ancien président a fait réagir mercredi le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, ainsi que l’ex-chef de la diplomatie Hubert Védrine. Aujourd’hui, Pierre Lellouche en remet une couche.

Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius «attendrait autre chose de la part d’un ancien président» après les critiques implicites de Nicolas Sarkozy contre l’immobilisme supposé de François Hollande sur le dossier syrien, dans un entretien jeudi au Parisien/Aujourd’hui.

«Je suis étonné que M. Sarkozy souhaite susciter une polémique sur un sujet aussi grave, alors qu’on attendrait autre chose de la part d’un ancien président», déclare Laurent Fabius.

Alors que l’ex-président a rapproché les crises syrienne et libyenne, le chef de la diplomatie française estime que «sur le fond, la situation de la Syrie est très différente de celle de la Libye».

«D’abord, d’un point de vue géostratégique puisque la Syrie est entourée, comme chacun devrait le savoir, de l’Irak, du Liban (avec les conséquences sur Israël), de la Turquie et de la Jordanie», explique Laurent Fabius.

D’autre part, «les situations militaires ne sont pas du tout les mêmes : la Syrie dispose de stocks d’armes importants, notamment chimiques».

«Les différences sont si manifestes qu’aucun pays n’a demandé ni souhaité une intervention militaire, ce qui n’était pas le cas pour la Libye. Tout ceci fait que je suis en effet surpris qu’on puisse avoir exercé d’importantes responsabilités et livrer une analyse aussi rapide…», ajoute-t-il.

Le ministre des Affaires étrangères s’interroge sur les raisons de l’intervention de Nicolas Sarkozy dans le débat : «est-ce que c’est (…) pour ne pas se faire oublier ? Est-ce que c’est parce qu’il n’a pas que des bons souvenirs avec Bachar al-Assad qu’il avait, avec un sens de l’anticipation particulier, invité en France pour présider les cérémonies du 14 juillet 2008 ?»

Pour Laurent Fabius, «dans des circonstances aussi graves, il vaut mieux faire bloc avec la politique de son pays».

Védrine voit «surtout des différences»

Former French Minister for Foreign Affairs Hubert Vedrine attends the opening session of the 2nd World Policy Conference held in Marrakesh, October 31, 2009. The conference will be held from October 30 until November 1. REUTERS/Jean Blondin (MOROCCO POLITICS)De son côté, l’ancien ministre des Affaires étrangères socialiste Hubert Védrine a dit voir «surtout des différences» entre les situations libyenne et syrienne, jeudi sur France 2.

«Ce qui m’a frappé dans cette déclaration» de l’ex-chef de l’Etat, «c’est l’idée de l’analogie entre Libye et Syrie», a affirmé Hubert Védrine qui voit «surtout des différences entre les deux situations».

«Dans l’affaire libyenne, il y avait un appel à l’aide des insurgés de Benghazi, soutenu par le Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe, soutenu par la Ligue arabe». Celle-ci «avait demandé une intervention», ce qui fait «que pendant quelques jours, la Russie et la Chine avaient, au Conseil de sécurité, été ahuries et n’avaient pas osé mettre le veto».

«C’est pas du tout comparable» à la situation syrienne. «Aujourd’hui, on ne peut pas parler de communauté internationale puisque la Chine et la Russie, qui en font partie, sont opposés à cette intervention», a-t-il poursuivi.

«Si la France devait agir aujourd’hui, ce serait seule sans la Grande-Bretagne, seule sans résolution du Conseil de sécurité (de l’ONU, ndlr). C’est une question à poser à Nicolas Sarkozy : on se retrouverait dans la même situation que George Bush en Irak en 2003».

«D’autre part, n’oublions pas que si la France et la Grande-Bretagne ont été remarquables dans l’affaire libyenne, ce n’était pas du tout possible sans la logistique de l’Otan ou américaine», souligne-t-il.

«Vous ne pouvez pas transposer ça sur la situation syrienne», explique-t-il. En outre, «dans le cas libyen, les dirigeants arabes étaient, disons-le, assez contents d’être débarrassés de Kadhafi. Dans le cas syrien, presque aucun régime arabe ne soutient le régime syrien maintenant, mais ils ont tous peur de la suite et les minorités en Syrie sont inquiètes de la suite parce qu’elles pensent qu’un régime sunnite extrémiste potentiel pourrait être dangereux», a ajouté Hubert Védrine.

Lellouche s’aligne sur Védrine

France's Foreign Trade Junior Minister Pierre Lellouche leaves the Elysee Palace in Paris at the end of the weekly cabinet meeting April 18, 2012. REUTERS/Benoit Tessier (FRANCE - Tags: POLITICS HEADSHOT)L’ex-secrétaire d’Etat UMP Pierre Lellouche explique quant à lui voir de «grandes différences» entre les crises libyenne et syrienne, ajoutant espérer que l’initiative de Nicolas Sarkozy sur le dossier syrien était «coordonnée» avec le nouveau pouvoir socialiste.

Alors que mardi, l’ex-président s’est entretenu avec le chef de l’opposition au régime de Bachar al-Assad, les deux hommes rapprochant le dossier syrien de la crise libyenne, Lellouche a relevé sur France Inter une «similitude» entre les deux situations parce que les deux pays sont soumis à «des révolutions». Mais «il y a surtout pour moi de grandes différences», a déclaré le député de Paris.

«En Libye – comme en Tunisie, comme en Egypte – on a affaire à des nations qui sont des nations arabes sunnites. En Syrie, on est un peu dans un scénario à l’irakienne où il y a une minorité, en l’occurrence alaouite, alliée aux chiites, qui dirige une majorité sunnite, en accord d’ailleurs avec d’autres minorités chrétienne, druze, kurde…», a-t-il détaillé.

L’autre «grande différence» c’est «le lien entre al-Assad et le régime iranien», a poursuivi Pierre Lellouche. «Je ne fais pas du tout partie de ceux qui disent qu’il n’y a qu’à intervenir, au contraire c’est très, très compliqué», a encore dit l’ancien secrétaire d’Etat, qui a cependant dénoncé «le silence assourdissant de la France».

«Les Etats-Unis sont ultra-présents, Hillary Clinton est dans la région du golfe, elle sera demain en Turquie, les Turcs sont en première ligne… et j’observe que la France est bien discrète sur le sujet», a-t-il ajouté.

Nicolas Sarkozy a-t-il eu raison de s’exprimer sur le dossier? «Je ne suis pas choqué par le fait qu’un ancien chef de l’Etat puisse, dans une démocratie, s’intéresser à une situation qui l’a occupé jusqu’à ses dernières semaines. J’espère que tout ça a été coordonné avec le nouveau pouvoir en place parce qu’il n’y a pas de place pour deux diplomaties françaises. Et que quand on est chef d’Etat, qu’on a été chef de l’Etat, on doit pouvoir se parler sur ces sujets-là», a encore dit Pierre Lellouche

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Les migrants roms sont des Européens

LE MONDE | 08.08.2012 à 14h29 • Mis à jour le 08.08.2012 à 18h52

Par Pouria Amirshahi, Christian Favier, Jean-Yves Leconte, parlementaires, et Laurent El Ghozi, membre du CNDH Romeurope

Il y a deux ans à Grenoble, Nicolas Sarkozy s’en prenait aux Roms, au prétexte d’actes délictueux dans lesquels cette communauté n’était nullement impliquée. Ce discours a servi à systématiser le démantèlement de lieux de vie précaires et à accélérer les expulsions collectives, notamment par l’utilisation de vols charter, au mépris de notre droit et des conventions internationales.

Force est de constater que cette agitation politique n’a pas résolu la question de la présence de ces migrants d’origine rom en France. Comment l’utilisation de telles méthodes aurait-elle pu le faire ? La bonne question est plutôt de savoir pourquoi des êtres humains choisissent de quitter leur pays d’origine pour vivre dans de telles conditions de précarité, dans toute l’Europe occidentale. La crise économique frappe durement les populations les plus fragiles des Balkans, et surtout les Roms. A ce titre, la première mesure à prendre est l’abrogation des mesures transitoires interdisant aux ressortissants roumains et bulgares d’accéder, comme tout citoyen européen, au marché du travail.

Sans levée de ces mesures, pas d’accès au droit commun, aux soins, au logement, à l’éducation, à la formation, et donc à une intégration réussie… C’est aussi le risque de voir se multiplier le nombre de ressortissants roumains et bulgares travaillant légalement en France à bas coût pour le compte d’entreprises européennes avec des contrats de détachement de main-d’oeuvre. C’est déjà le cas sur de gros projets de construction ou dans le domaine du transport routier. Du coup, c’est l’impossibilité de percevoir des cotisations et des impôts grâce à un travail déclaré en France.

Une seconde raison consiste à fuir la stigmatisation permanente de la part des populations majoritaires détentrices du pouvoir. Il suffit de lire les nombreux rapports des agences européennes et internationales chargées des droits de l’homme et de la lutte contre les discriminations pour appréhender l’impact de ces discriminations quotidiennes sur les conditions de vie des Roms dans leur pays d’origine.

En France, même dans un camp, avec un peu de chance et l’appui de collectivités locales engagées, les enfants sont scolarisés, les nouveau-nés et leurs mères sont suivis, le milieu associatif accompagne ces populations marginalisées. Bien sûr, la vie en bidonville est intolérable.

Alors comment sortir de cet état de fait ? On estime à moins de 20 000 le nombre de personnes supposées d’origine rom vivant en habitat précaire. Elles s’ajoutent à des dizaines de milliers de personnes de toutes origines qui n’ont pas plus accès au logement et à l’emploi, et qui se trouvent, elles aussi, en situation de marginalisation.

L’urgence consiste alors à donner les moyens nécessaires aux acteurs publics et privés responsables de la lutte contre les exclusions. Pour montrer cette priorité, Jean-Marc Ayrault a nommé une ministre chargée de cette exigence, Marie-Arlette Carlotti. C’est à elle qu’il appartient, en partenariat avec les différents ministères concernés, d’animer une stratégie nationale d’inclusion qui cible non seulement les Roms, mais bien toutes les personnes fragilisées ou précarisées.

La majorité précédente n’avait que faire de cette priorité, préférant le gaspillage des fonds publics dans une politique d’expulsion dont on oublie d’analyser le coût. Quel gâchis, en effet, de voir un ressortissant roumain expulsé par avion, accompagné par deux policiers français – ceci coûtant au contribuable 8 000 euros, soit cinq smic -, et de le voir revenir en France quelques jours plus tard parce qu’il n’a subi aucune condamnation de justice et que sa liberté de circulation est un des acquis de la construction européenne. De même pour le coût annuel moyen de 27 000 euros par famille accueillie en « village d’insertion », sans aucune insertion réelle possible, faute d’accès au marché du travail…

Face à l’incurie de l’Etat sarkoziste, beaucoup de collectivités locales ont pris leurs responsabilités, en mettant en oeuvre des « villages d’insertion », mais aussi par une action sociale de proximité, s’adressant à tous. Tirons les leçons de ces expérimentations au travers d’un grand dialogue national associant toutes les parties prenantes pour que la fermeture des lieux d’habitat indignes fasse l’objet d’un réel accompagnement vers l’emploi, le logement et l’insertion.

Examinons aussi comment les fonds européens pourraient abonder des programmes de coopération décentralisée visant à couvrir les frais engagés par les collectivités dans leurs efforts pour conduire des projets d’accueil de migrants. Mais commençons, avec la levée des mesures transitoires, par permettre à ces personnes de gagner légalement leur vie et de s’intégrer avec leur famille.

C’est d’ailleurs ce qu’a exprimé François Hollande dans son courrier à Romeurope en mars. C’est cette première étape que nous entendons franchir pour que les migrants roms disposent des mêmes droits que tous les Européens.

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Le Parlement vote le budget 2012 : Sarkozy détricoté

économie

Pierre Moscovici, ministre de l'Economie à l'Assemblée nationale. /PhotoPQR, Le Parisien. - Tous droits réservés. Copie interdite.

Pierre Moscovici, ministre de l'Economie à l'Assemblée nationale. /PhotoPQR, Le Parisien. ()

Pierre Moscovici, ministre de l’Economie à l’Assemblée nationale. /PhotoPQR, Le Parisien.

Au  terme d’une session extraordinaire chargée, le Parlement a adopté hier le collectif budgétaire 2012, premier acte du quinquennat de François Hollande qui a détricoté plusieurs des mesures mise en place par Nicolas Sarkozy.

Le Parlement a voté définitivement hier le premier acte budgétaire de l’ère François Hollande qui prévoit 7,2 milliards d’euros de hausses d’impôts et jette aux orties la «TVA sociale» et les heures supplémentaires défiscalisées, deux symboles du quinquennat Sarkozy.

Principal texte de la session extraordinaire, ce budget rectificatif 2012 a constitué un avant-goût du budget 2013, discuté à l’automne mais déjà dans toutes les têtes.

Le gouvernement a ainsi assuré que la loi de finances 2013 ne comporterait pas d’augmentation de la CSG, même si cette dernière piste ne semble pas absolument exclue, ultérieurement, pour le financement de la protection sociale.

Et maintenant le budget 2013

Le texte voté hier enterre la hausse de la TVA de 1,6 point décidée en début d’année, qui aurait dû compenser une baisse des cotisations familiales dues par les entreprises et s’appliquer en octobre, ainsi que les exonérations sociales (patronales et salariales) et fiscales liées aux heures supplémentaires. L’opposition UMP s’est vivement élevée contre l’abrogation des mesures phares de Nicolas Sarkozy (lire encadré).

Le projet de loi de Finances rectificative 2012 prévoit aussi, conformément à la promesse du candidat Hollande, la suppression de la TVA sociale, qui avait été votée en févrer. Le collectif a par ailleurs mis en place une contribution exceptionnelle sur la fortune. L’UMP a d’ores et déjà prévu de la contester dans son recours devant le Conseil constitutionnel.

Doublement de la taxe sur les transactions financières, taxe sur les risques systémiques pour les banques, taxation sur les stocks pétroliers… plusieurs autres mesures ont été prises afin de faire respecter l’objectif de 4,5 % de déficit pour 2012. «Matraquage fiscal», accuse le président des députés UMP, Christian Jacob. «Redressement des comptes dans la justice» pour le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault.

C’est dans cet état d’esprit que le gouvernement va maintenant plancher sur le budget 2013. L’on sait déjà qu’aucune hausse de la CSG n’est prévue au budget 2013 pour contribuer à renflouer les caisses de l’État ou à réduire les cotisations sociales des entreprises afin d’en renforcer la compétitivité, a déclaré lundi le ministre délégué au Budget Jérôme Cahuzac.


Passes d’armes entre l’UMP et la majorité

En supprimant l’exonération des charges sur les heures supplémentaires, votée en 2007 à l’arrivée de Nicolas Sarkozy et symbole du slogan «Travailler plus pour gagner plus», le PS s’en est pris au pouvoir d’achat des classes moyennes et populaires, ont accusé des anciens ministres comme Xavier Bertrand, Éric Woerth, ou Laurent Wauquiez. «C’est une session parlementaire qui a été quasi exclusivement consacrée à défaire ce qui a été fait, défaire, annuler, abroger, casser sans rien construire», a encore critiqué hier l’ancienne porte-parole du candidat Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet. L’UMP n’a pas hésité à utiliser toutes les ficelles de procédure pour ralentir les débats, et à multiplier les incidents de séance. «Flibusterie parlementaire», a tonné le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac.

La Dépêche du Midi

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Réussir le changement

Contribution générale présentée par Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault

 

Au printemps 2012, les Français ont choisi le changement.

Changement de politique. En élisant François Hollande, puis en donnant à l’Assemblée nationale la majorité aux socialistes et à leurs partenaires de gauche et des écologistes, nos concitoyens ont adhéré au projet de redressement dans la  justice porté par le chef de l’Etat et le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, et dont nous avions  posé ensemble les fondations lors de l’adoption de notre projet.

Changement de pratique politique. Le vote des Français de mai et juin 2012, c’est aussi le souhait d’un exercice des responsabilités soucieux de sobriété, d’efficacité, d’écoute, de dialogue, désireux d’agir avec le sens de la parole donnée et du long terme.

Changement aussi en Europe bien sûr, ou plutôt changement d’Europe. En décidant l’alternance, le peuple français, l’un des fondateurs de la construction européenne, a voulu lui donner un nouveau cours. La croissance qui crée des emplois au lieu de la récession et de la spirale du chômage, le sérieux financier contre les marchés, la protection des savoir-faire et des entreprises face aux délocalisations, la volonté politique face aux laisser faire des libéraux.

Changement de système enfin, du local au global, avec la conviction que l’avenir se joue maintenant. A toutes les échelles, pour toutes les générations, se fait sentir l’impératif d’une réconciliation : entre l’humanité et la planète, entre l’urgence et le temps long, entre l’individu et le collectif, entre la technique et l’éthique. De cette espérance aussi, la victoire des socialistes français dans le pays de l’universel par excellence, est dépositaire devant l’Histoire.

Nous, militantes et militants socialistes, avons contribué collectivement à faire élire le changement. Il nous faut maintenant le faire réussir.

C’est une tâche immense, plus exaltante encore que la conquête des responsabilités, qui nous invite à prolonger pour le consolider le fil du socialisme démocratique, en partant du réel pour aller à l’idéal.

C’est une tâche fondamentale : nous devons tirer les leçons des expériences passées pour rendre l’alternance de 2012 fructueuse et durable. Inscrire la gauche dans la durée des suffrages et des réformes, c’est l’ardente obligation que nous devons aux Français qui souffrent de la crise et de ses dégâts, mais c’est aussi un devoir à l’égard de ceux qui nous ont devancés et des prochaines générations de militants qui pourront prendre appui sur nos succès pour en bâtir de nouveaux.

C’est à ce chemin que doit être consacré le Congrès des socialistes à l’automne prochain.

 

I – Réussir le changement, c’est tenir nos engagements

 

En 2012, les Français de l’Hexagone et des outre-mer ont accordé leur confiance aux socialistes. Cette adhésion, chacune et chacun de nous l’éprouve comme un honneur et une responsabilité : l’honneur de porter l’espérance populaire et la responsabilité de la faire advenir dans la vie quotidienne.

La double victoire présidentielle et législative n’est pas seulement une victoire de la gauche contre la droite : elle est celle de la confiance retrouvée.

Confiance retrouvée dans la politique : en République, la véritable agence de notation, c’est le suffrage universel.

L’histoire des trente dernières années est le récit d’une dépossession du pouvoir politique et de ses représentants par des institutions supranationales insuffisamment démocratiques au fonctionnement complexe et aux décisions lointaines, par des marchés financiers au service des intérêts d’une minorité, par un commerce mondial sans règles. S’y ajoutent d’autres phénomènes, souvent agressifs, parfois positifs, qui ont remis en cause des solidarités collectives sans que d’autres viennent les remplacer : l’éclatement de la famille traditionnelle, la fragmentation du travail qui place les salariés sans protections collectives dans l’entreprise, la fin des grandes idéologies collectives qui laisse parfois place au nationalisme et au repli sur soi et même à l’intégrisme religieux et à l’obscurantisme. Cela rend urgente la construction d’une interprétation laïque du monde et de la destinée commune.

Face à cette tendance, l’alternance en France prend une signification particulière et même historique : après une décennie en France de dépossession du citoyen et d’affaiblissement de la puissance publique, elle marque le retour du volontarisme transformateur, celui qui permet aux femmes et aux hommes de choisir leur destin et de définir les moyens de l’accomplir.

2012, c’est aussi la confiance retrouvée dans le politique. L’affaiblissement de la parole publique est une autre caractéristique des dernières années. En témoignent l’abstention et en partie, même si elle est aussi le résultat d’une défaite culturelle et idéologique, la montée de l’extrémisme.

De cette dégradation démocratique, le sarkozysme est responsable pour une large part : les promesses furent si nombreuses, les annonces si peu suivies d’effets et les résultats furent si minces ! Quand « travailler plus pour gagner plus » se change en « chômer plus pour toucher moins », quand un Gouvernement dénonce les patrons voyous à la tribune des G20 et qu’il conforte leurs privilèges dans les lois de finances, quand le chef de l’Etat annonce la « France des droits de l’homme » et qu’il déroule le tapis rouge à Bachar-al-Assad le jour de la fête nationale, quand un pouvoir se promeut protecteur de la « France des usines » et qu’il les laisse être démantelées ou déménagées par des financiers, bref quand les mots disent l’espoir et les actes font le désespoir, les citoyens doutent non seulement de ce pouvoir-là, mais de l’action publique en général.

C’est à cet abaissement de la crédibilité politique que nous voulons mettre fin. Nous avons déjà commencé, en respectant quelques principes simples et forts. Ne jamais dire ce qui ne pourra être fait. Ne jamais rien cacher des efforts à consentir. Ne jamais accuser les autres – et d’abord nos partenaires européens – de nos propres manques ou manquements hexagonaux. Prendre des engagements précis. Définir les moyens en même temps que les fins. Agir dans l’opposition comme on le fera aux responsabilités. Ces exigences nous ont guidés lors de l’élaboration du contre-plan de relance en 2009, de la plateforme pour les élections régionales et de la réforme alternative pour la sauvegarde des retraites en 2010, des propositions pour le scrutin départemental et pour notre projet socialiste en 2011, pour les 60 engagements du projet présidentiel de François Hollande en 2012 : un cap clair, des réponses innovantes aux défis du moment, des financements prévus du premier au dernier euro, un calendrier crédible, voilà comment la parole publique retrouve du crédit.

Nous avons retrouvé du crédit en portant aussi le bon diagnostic sur la France et l’Europe, le monde et le moment.

Diagnostic d’une crise qui n’est pas un accident de conjoncture, mais le vacillement d’un système. Les égarements des traders ont révélé plus que l’épuisement d’une finance débridée. Ils ont levé le voile sur la vision du monde qui la sous-tend : la tyrannie du court terme et de la rentabilité immédiate, la mainmise de la finance sur l’économie réelle, la marchandisation envahissant toutes les activités humaines – l’eau, l’air, la santé, le vivant, la culture –, la confiscation du pouvoir par une nouvelle aristocratie d’argent.

Diagnostic d’une Europe qui s’est affaiblie dans la mondialisation parce que, si elle est parvenue à être un grand marché, elle a oublié qu’elle était avant tout une grande idée. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, les pères fondateurs s’étaient retrouvés autour d’un pari : l’union des nations européennes les protégerait toutes des périls et elle offrirait à chacune la paix et le progrès. Le primat des gouvernements, majoritairement conservateurs dans la dernière décennie, et l’affaiblissement des institutions européennes, la Commission au premier chef, se sont additionnés pour donner trop libre cours aux seules politiques libérales de marché. Faute d’ambition politique et sociale, la construction européenne a subi de plein fouet les effets d’une mondialisation dérégulée et les conséquences des dérèglements du capitalisme financier. Aujourd’hui, les peuples s’éloignent de la promesse européenne parce que celle-ci s’est éloignée d’eux.

Que l’Europe n’ait pas assez été protectrice pour les peuples, ne nous fait pas oublier que justement dans la mondialisation, face aux grandes puissances, anciennes et nouvelles, et aux entreprises multinationales, l’Union européenne nous donne une capacité d’action, par sa profondeur et sa dynamique, que nous n’aurions pas seuls, peut et doit être le continent régulateur face aux nouveaux défis planétaires : le changement climatique et ses dangers, la course au moindre coût avec ses dégâts humains et environnementaux, la crise alimentaire et le choc énergétique qui vont accroître la pauvreté dans les nations et les tensions entre grands ensembles régionaux, l’orientation éthique des bouleversements de la technique, la menace des intégrismes religieux et du fanatisme terroriste, etc.

Diagnostic, enfin, d’une France à la recherche d’elle-même. Ce fut le principal enseignement du tour de France mené tout au long de 2009, quand nous avons décidé de confronter, au plus profond du pays, nos convictions aux inquiétudes et aux attentes des Français. Les inquiétudes, ce sont celles des classes moyennes qui redoutent ou qui vivent le déclassement social – licenciements, difficultés pour se loger ou se soigner, angoisse face à l’avenir des enfants, à leur accès à un emploi, une formation, un logement. Les inquiétudes, ce sont celles des ménages modestes et des couches populaires qui craignent le basculement dans la précarité : elles sont les premières victimes de la vie chère, de la disparition des services publics, de l’insécurité ou de la ghettoïsation de la société. Dans notre société, le rapport à l’avenir est plus dual que jamais : d’un côté, il y a les personnes ou les groupes sociaux qui, inclus dans un monde en mutation, le vivent comme une opportunité où eux-mêmes auront leur place ; de l’autre côté, les individus – majoritaires même s’ils n’ont pas forcément conscience de l’être – qui se sentent fragilisés, relégués voire menacés dans le monde tel qu’il va, et n’imaginent d’avenir ni pour eux-mêmes ni pour leurs enfants.

En même temps, nous le savions et les Français nous l’ont confirmé à chaque étape de notre dialogue avec eux, la France a des atouts et il n’appartient qu’à elle d’en user. Sa géographie, sa langue, son histoire et sa culture, sa démographie, ses infrastructures, ses services publics, sa main d’œuvre qualifiée, sa jeunesse, ses créateurs et ses entrepreneurs, les ressources de ses territoires, ses technologies de pointe et sa recherche. Comment la nation a-t-elle pu se priver de tels ressorts au cours des dernières années, parfois depuis plus longtemps encore ? Les Français n’ont pas voulu un tel renoncement. Il est le fait d’une idéologie qui a consacré la loi du plus fort, fait de l’argent la mesure d’une vie réussie, confondu l’aspiration à l’autonomie avec l’égoïsme, identifié la modernité à la remise en cause des conquêtes sociales et cru au mirage d’une « mondialisation heureuse » car autorégulée.

Du tour de France du projet en 2009, au programme présidentiel de François Hollande en 2012, une même conviction nous a animés : le besoin de retrouver la France qu’on aime et l’envie de ré-enchanter le rêve français. Il y a un rêve américain, qui est un rêve de réussite individuelle et d’abord matérielle. Il y a un rêve français, qui récompense le mérite de chacun et le progrès de tous. La France, c’est la promesse d’égalité républicaine, le modèle social qui la porte et les services publics qui l’incarnent. La France, ce sont des valeurs plus grandes que l’Hexagone : les droits de l’homme, la coopération européenne, l’aspiration à la justice et au développement partagé, et d’abord avec l’Afrique. La France, c’est la laïcité, qui accueille tous les religions pourvu que la religion n’excède pas le champ privé et qu’elle respecte le socle de nos valeurs communes. La France, ce sont des outre-mer qui sont une richesse de cultures qui doit être valorisée. Pendant que la droite se perdait à exhumer une « identité nationale » qui rapetissait la France, les Français aspiraient à renouer avec l’identité républicaine qui inspire les peuples qui combattent l’oppression.

Nous avons montré qu’il est possible de moderniser nos réponses en portant haut nos valeurs.

La crise a donné raison aux analyses de la gauche. Après trois décennies marquées par le triptyque déréglementation-privatisations-délocalisations, l’urgence d’un nouveau cycle régulateur s’impose. Les conservateurs ont tort de considérer qu’il s’agit là d’une revendication hexagonale. Certes, en France, la gauche depuis plusieurs années et le Gouvernement depuis le printemps dernier, sont à l’avant-garde du combat pour ordonner, maîtriser et humaniser la mondialisation. Mais cet impératif mobilise bien au-delà de nos frontières.

C’est manifeste en Europe où socialistes et sociaux-démocrates ont rompu avec la tentation de la « troisième voie » en vogue à la fin des années 1990. L’idée d’un nouvel interventionnisme de la puissance publique et la volonté d’une construction européenne plus soucieuse de politiques concrètes pour les peuples que de procédures ou de normes favorables au marché, sont deux preuves d’une gauche de nouveau fière de ses valeurs et de ses réalisations. A cette évolution salutaire, le Parti socialiste français a apporté une contribution décisive.

En Europe, sous l’impulsion de François Hollande, cette évolution fait des émules bien au-delà de la gauche – à commencer par les dirigeants d’autres puissances économiques telles l’Italie et l’Espagne. Un même mouvement s’opère bien au-delà de l’Europe dans le monde. C’est vrai aux Etats-Unis où le président Obama fait prévaloir la croissance face à la finance et mobilise l’action publique pour protéger l’emploi industriel en misant sur les nouvelles technologies ou faire progresser les droits sociaux comme en matière de couverture maladie avec l’« Obamacare ». C’est vrai dans de nombreux pays d’Amérique latine où gouvernants et sociétés civiles sont engagés dans la préservation des biens publics et la réciprocité dans les échanges commerciaux. Parmi plusieurs nations émergées – par exemple en Inde en matière de droits sociaux –, la nécessité de règles améliorant le sort de la population et les relations avec les autres grands ensembles de la planète commence à être prise en compte. Si la bataille n’est pas gagnée – la difficulté à faire progresser les protections dans le domaine environnemental et de la biodiversité le montre hélas –, elle est clairement lancée. Après un cycle néo-libéral entamé sous l’ère Reagan-Thatcher et amplifié depuis la fin des années 1970, la perspective d’un nouveau cycle, régulateur et protecteur, se profile. Il faut mesurer cette chance historique et ne surtout pas la manquer.

Les premières avancées ont été obtenues parce que nous avons hissé haut nos couleurs, celles du socialisme républicain. Ce bien commun remonte loin et prend appui sur des fondations solides. Les héritages spirituels et philosophiques, les héritages de l’humanisme du XVIe siècle, l’esprit des Lumières, le féminisme, cette histoire est celle de tous les Français, mais elle a une actualité permanente. Pour nous socialistes, elle se nourrit des combats de 1789 et de 1792, de l’insurrection populaire de 1848 et de l’abolition de l’esclavage, de la Commune de Paris et de la loi de 1905 sur la séparation des églises et de l’Etat, du Front populaire, de l’Appel du 18 juin 1940, du Conseil national de la Résistance, des grandes grèves et du mouvement de la jeunesse de 1968, de 1981 et 1997 et des avancées économiques, sociales et sociétales que nous avons réalisées dans l’exercice du pouvoir. A chaque fois, une même volonté, celle du peuple de se mobiliser pour la liberté sans laquelle rien n’est possible, l’égalité qui doit être réelle, la fraternité et la laïcité qui sont le ciment du pacte social.

Mais ce patrimoine n’est pas un musée : la constance dans les valeurs va de pair avec l’exigence d’actualisation des réponses aux temps et aux défis nouveaux.

Le défi premier, le défi vital, c’est le rapport à la planète elle-même. Raréfaction de l’eau, épuisement des énergies fossiles, déforestation, appauvrissement de la biodiversité, urbanisation incontrôlée : nous faisons comme s’il y avait une seconde Terre à investir une fois épuisées les ressources de celle qui nous accueille. Partout, périls écologiques et inégalités sociales se renforcent mutuellement. Ce constat, nous l’avons établi depuis plusieurs années maintenant et nous en avons fait l’un des socles du socialisme pour le 21e siècle. Dans la déclaration de principes adoptée en 2008, nous plaidons pour une économie sociale et écologique de marché. Dans le projet pour 2012, nous traçons les contours et fixons le contenu d’un modèle de développement assis sur les nouveaux compromis entre économie et écologie, justice sociale et démocratie. Ont été mises en évidence des solutions inédites pour concevoir, produire, consommer, échanger mieux. Ainsi, nous plaidons pour la diversification et la performance énergétiques, les circuits locaux pour l’agriculture et la pêche avec des clauses de proximité dans les marchés publics, le déploiement des transports collectifs décarbonés, une production industrielle et une construction de logement économes en énergie. Oui, le socialisme à venir est une social-écologie.

La planète est un tout : c’est un fait sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Bien sûr, ce phénomène est ambivalent. L’internationalisation des échanges et des entreprises, mais aussi celle des cultures et des technologies, sont porteuses de progrès et de développement pour les peuples. Reste que l’émergence de multinationales en apesanteur, financiarisées dans leurs objectifs, fragmentées dans leur capital, délocalisées dans leur production, remet en cause la souveraineté des Etats et des peuples sur l’économie. Retrouver la maîtrise sur son cours est indispensable. Plusieurs changements ont commencé. Nous portions depuis vingt ans l’idée d’une véritable taxation sur les transactions financières – nous attirant ainsi les sarcasmes de la droite : elle est en passe de voir le jour dans le cadre d’une coopération renforcée en Europe et elle permettra de renouer avec la souveraineté fiscale et de décourager la spéculation financière. Nous avons inventé, nous socialistes français, la belle idée du « juste échange », dépassant le débat entre les deux impasses du libre-échange intégral et du protectionnisme autarcique. Cette idée simple et forte – organiser le commerce mondial dans le respect des règles et des normes sanitaires, sociales et environnementales – de la réciprocité commerciale doit être au cœur du combat multilatéral des prochaines années, notamment de nos discussions avec la Chine au sein de l’Organisation mondiale du commerce. De premiers pas ont été faits :  ce concept figure désormais en bonne place des textes des socialistes et sociaux-démocrates européens et, sous l’impulsion de la France, les communiqués des conseils européens y font référence.

La mondialisation a ébranlé les Etats nations, elle a aussi bousculé l’organisation du travail en leur sein. Le modèle classique des salariés accomplissant toute leur carrière dans la même entreprise est aujourd’hui révolu : chacun sait qu’il changera d’entreprise ou de métier plusieurs fois dans sa vie. De cette mutation est née l’idée de créer une sécurité sociale professionnelle – matérialisée par un compte temps formation – qui permettra de reprendre les études interrompues prématurément, de rebondir pendant les périodes de chômage et de garantir à chacun une réelle progression professionnelle. C’est une ambition aussi élevée que celle de la Sécurité sociale au lendemain de la guerre.

Autre transformation profonde et durable de nos sociétés : l’aspiration à la reconnaissance de l’autonomie individuelle. Elle n’est pas seulement le contrecoup de l’affaiblissement des solidarités ou des structures collectives sous l’effet de la crise. Elle est le prolongement des sociétés démocratiques où chacune et chacun entend être maître de son destin, ainsi que la conséquence de l’accès aux connaissances, aux opportunités et au monde. Elle nous a amenés à proposer une conception nouvelle de l’action publique conciliant les garanties collectives – sans lesquelles la société vire au conflit de tous contre tous et dont les plus modestes ou les moins instruits sont les victimes – et la personnalisation des droits et des services publics.  C’est le sens de la réforme de l’éducation nationale qui vise, à travers les programmes, les rythmes scolaires, les activités périscolaires, la formation des professeurs, à apporter à chaque enfant les réponses les plus adaptées à ses difficultés, mais aussi à ses talents et à ses aspirations. C’est aussi, face au défi du vieillissement, la mise en oeuvre de modes de prise en charge de la dépendance adaptés à la volonté et à la situation de chacun. Au-delà, c’est penser une société qui permette à chacun non seulement de bien vivre, mais aussi de bien vieillir. Au-delà de la nécessaire recherche permanente de la bonne utilisation de l’argent public, là est sans doute l’enjeu le plus fondamental de la réforme de l’Etat dont nous sommes porteurs.

Cette prise en compte des aspirations individuelles doit aller de pair avec la réaffirmation des devoirs : le respect des règles, le respect des autres qui permette la sécurité, la laïcité, la lutte contre toutes les discriminations. Et c’est parce que nous voulons rétablir l’exemplarité de l’Etat que nous sommes aujourd’hui les mieux placés pour faire respecter les règles du vivre-ensemble républicain.

Enfin, la ghettoïsation de la société, qui n’a cessé de s’aggraver depuis des décennies, est un autre mal français auquel nous nous sommes attelés. La ville devrait être un lieu de rencontre et solidarité, l’urbanisme des années 1950 a créé de l’isolement, de l’exclusion et du repli communautariste. Rien ne serait pire que de nier cette réalité ou encore de faire comme si les violences urbaines de l’automne 2005 ne s’étaient pas produites. La carte des inégalités sociales tend à se confondre avec celle des inégalités territoriales, à tel point que les politiques sociales deviennent impuissantes si elles ne sont pas accompagnées de politiques urbaines. Pour y répondre, nous avons initié un travail sur la ville du 21ème siècle, une ville dense et intense, où chaque quartier mêle les catégories sociales et les différentes fonctions de la vie : logement, santé, activités économiques, culture, sport. C’est un nouvel art de ville, avec la qualité partout – espaces publics,  logements, équipements – pour un nouvel art de vivre.

Sociale-écologie de marché, juste échange, services publics personnalisés, urbanisme humain,  etc., sont autant de chantiers majeurs pour les années à venir et qui dessinent les contours de l’après-crise. Ils nous mobiliseront bien au-delà du quinquennat qui s’ouvre. Nous devons en poser les jalons dès maintenant.

Préparer l’après crise, mais aussi, bien sûr, c’est un préalable, réussir la sortie de crise. C’est le sens des priorités claires que nous avons revendiquées, les 60 engagements de François Hollande. Ils seront tenus, malgré le lourd passif légué par dix ans d’errements de la droite et dont la gravité a été confirmée par la Cour des comptes.

C’est d’abord le redressement. Les efforts qui doivent être faits pour relever la France seront réalisés, sans confondre sérieux et austérité : le redressement sera financier, mais aussi productif, éducatif, social, environnemental. C’est ce qu’a réaffirmé notre Premier Ministre Jean-Marc Ayrault lors de sa déclaration de politique générale. Parce que, pour nous, l’emploi est la priorité des priorités, nous voulons refaire de la France une grande puissance économique. Il faudra pour cela remettre la finance au service de l’économie : nous le ferons en commençant par séparer les activités financières de spéculation et celles qui sont destinées à l’économie et à l’emploi ! Il faudra une nouvelle politique industrielle, qui protège et innove, qui soutient nos PME et aide à la création d’entreprise, qui investit dans la recherche et les filières d’avenir : nous la bâtirons. La banque publique d’investissement régionalisée en sera le bras armé et l’épargne des Français sera dirigée vers les PME et les filières d’avenir. Nous devons réarmer la compétitivité économique de notre pays qui s’est considérablement affaiblie toutes ces dernières années comme le démontrent les chiffres du commerce extérieur mois après mois. Il faudra soutenir l’emploi des jeunes : nous le ferons à travers la mise en place des  contrats de génération et  les emplois d’avenir. Il faudra combattre les licenciements abusifs : nous légiférerons pour y parvenir. Il faudra redonner du pouvoir d’achat : nous avons déjà commencé à agir avec la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire, un premier coup de pouce au Smic et le blocage des loyers dans les zones de forte spéculation. Nous poursuivrons en nous attaquant à cette longue et rude tâche qu’est la réforme profonde de notre système fiscal dont chacun reconnaît son injustice sociale, son inefficacité économique et son opacité pour nos concitoyens. Dans les outre-mer, que la droite a abandonnés durant ses 10 années au pouvoir, il faudra lutter contre le chômage de masse, lutter contre la vie chère et porter une ambition d’excellence pour la jeunesse qui aspire, comme tous les peuples des outre-mer à l’égalité réelle.

Le redressement sera aussi européen. Après d’innombrables « sommets de la dernière chance » qui n’ont pas pris la mesure des problèmes et n’ont ajouté de l’austérité à l’austérité, le sommet des 28 et 29 juin dernier a marqué un tournant. Il faut le confirmer. L’Europe apporte enfin les premières réponses à la crise de la dette et de l’euro. Avec François Hollande à l’initiative, les lignes ont bougé en Europe. Sur le fond – croissance et réduction des déficits sont deux objectifs qui doivent aller de pair –, comme sur la méthode – une pratique plus efficace de la relation franco-allemande au service du collectif européen –, l’Europe commence à être remise sur les rails de la solidarité et de l’avenir.

Des solutions ont été trouvées pour répondre à l’urgence, avec la possibilité  pour  le  Mécanisme Européen de Stabilité d’aider directement les banques. Des décisions ambitieuses ont été prises pour la croissance et son financement avec le pacte de 120 milliards d’euros et avec la mise en place d’une taxe sur les transactions financières sous forme d’une coopération renforcée. Des perspectives de long terme ont été dessinées, sur les domaines bancaires, budgétaires, économiques et démocratiques, pour approfondir l’union monétaire et renforcer la solidarité budgétaire de l’Europe.

C’est une première étape, qui en appelle d’autres : l’objectif, c’est une Europe plus forte, plus sociale, plus écologique et plus démocratique ; la méthode c’est l’intégration solidaire. Dans les mois qui viennent, il faudra avancer vers des solutions durables à la crise des dettes souveraines, ce qui n’est pas séparable du renforcement de la convergence budgétaire. Nous devrons continuer de réorienter la politique commerciale de l’Union dans la sens du juste échange et de la réciprocité. Nous souhaitons avancer vers un véritable gouvernement économique de la zone euro capable de promouvoir une croissance durable et de créer des emplois. Cela impliquera de  répondre à des questions majeures sur les différents cercles d’adhésion, sur le niveau du budget communautaire qui doit enfin disposer d’une vraie force d’intervention ou sur le fonctionnement des institutions à rapprocher des citoyens. Le principe général est clair : chaque pas en avant vers plus de solidarité impliquera le respect de principes d’action partagés  et un surcroît de contrôle démocratique.

L’action européenne ne sera légitime et comprise par les citoyens que si un travail réel d’approfondissement de son fonctionnement démocratique est entrepris. L’Europe souffre non pas d’un excès mais d’un déficit de politique et de démocratie. L’Allemagne a fait des propositions, à nous de porter les nôtres, pour le Parlement, pour la Commission, pour l’élection éventuelle d’un Président de l’Union. Les socialistes seront plus forts, si leurs propositions sont d’abord débattues avec les autres partis socialistes européens, au premier rang desquels le SPD allemand, et présentées ensuite, si possible, au nom de tous.

Le chemin du redressement, nous l’emprunterons avec une exigence permanente de justice. Elle sera remise au cœur des décisions, en commençant par la justice fiscale : la TVA Sarkozy sera supprimée, les plus gros patrimoines et les plus hauts revenus seront sollicités, le capital contribuera au moins autant que le travail. Les classes populaires et moyennes seront prioritairement protégées, tout comme les PME et les TPE. Justice sociale aussi, amorcée par la retraite à 60 ans pour les salariés qui ont exercé les carrières les plus longues. Justice territoriale, avec un nouvel acte de la décentralisation. Il consistera à octroyer plus d’autonomie et plus de responsabilités aux collectivités territoriales – notamment aux Régions et aux intercommunalités, à simplifier leurs relations et leurs compétences, à garantir la péréquation entre les territoires et en leur sein, à donner aux acteurs sociaux et aux citoyens une plus grande capacité d’évaluation et de participation. Justice en tant qu’institution : nous garantirons l’indépendance de tous les magistrats et de tous les tribunaux. Déjà, le Gouvernement n’intervient plus dans les dossiers individuels. Mais nos concitoyens attendent aussi légitimement que l’accès à la justice de proximité soit facilité, c’est-à-dire simplifié et accéléré. De même qu’ils souhaitent que les peines prononcées soient effectivement exécutées et les prisons conformes à nos principes de dignité.

Le redressement dans la justice, c’est aussi le levier du progrès retrouvé. Aujourd’hui, les Français sont inquiets et même angoissés. Ils attendent de ceux auxquels ils ont confié leur destin qu’ils suivent le chemin qu’ils leur ont proposé pour sortir de la crise, sans se préoccuper des polémiques entretenues par l’opposition. L’aspiration commune et le lien entre les générations, les situations, les territoires, les origines résident dans la possibilité que demain soit meilleur qu’aujourd’hui, et d’abord pour la jeunesse. Il n’y pas de société qui tienne sans cet espoir, il n’y a pas de France sans ce rêve français. C’est la conviction magnifique portée par François Hollande lors de l’élection présidentielle. A nous, autour du Président et du Premier ministre, de la mettre en actes. Ainsi serons-nous fidèles à notre histoire et aux militants qui nous ont précédés. C’est l’attachement à la justice qui est la marque du socialisme démocratique. A chaque fois que la gauche a exercé le pouvoir national, ce fut une avancée pour les droits individuels et les libertés publiques. Le quinquennat qui est engagé en sera la confirmation : égalité entre les femmes et les hommes, droit au mariage et à l’adoption pour tous les couples, nouvel acte de l’exception culturelle française, part de proportionnelle aux élections législatives, non-cumul des mandats, droit de vote pour les étrangers en situation régulière aux élections municipales. L’honneur d’exercer la conduite de la nation n’est pas séparable de la volonté d’être nous-mêmes : des républicains qui veulent réenclencher la marche du progrès.

 

 

II – Réussir le changement, c’est mobiliser la société

 

Notre pays a besoin d’un cap clair pour l’immédiat comme pour le long terme. Il a besoin d’une mobilisation de toutes les forces du pays. Ce défi est celui de la démocratie elle-même. Encore faut-il la concevoir dans toutes ses dimensions : démocratie politique donc représentative bien entendu, mais aussi démocratie sociale, économique, culturelle, territoriale. La démocratie jusqu’au bout à laquelle aspirait Jaurès, voilà plus d’un siècle est une invitation à l’audace et au partage : l’audace de rendre possible ce qui ne l’était pas, le partage du pouvoir avec les citoyens, les partenaires sociaux, les créateurs, les autres Etats européens, la communauté internationale et ses acteurs.

Pour nous, redisons-le, la démocratie est d’abord représentative. Qu’elle soit en crise – pourquoi le nier quand tant de nos concitoyens ne se rendent pas aux urnes  – ne doit pas nous conduire à l’oublier, mais à œuvrer pour lui redonner son crédit et sa grandeur.

Il fallait pour cela commencer par rompre avec les années Sarkozy, celles d’un seul homme qui décidait de tout, partout, tout le temps et pour tous. Son Premier ministre n’était qu’un collaborateur, ses ministres sous tutelle des conseillers à l’Elysée, le Parlement une chambre d’enregistrement. La justice devait obéir aux ordres du pouvoir politique, et les médias ne pas fâcher celui-ci. Ces temps sont révolus. Nous avons retrouvé une pratique normale des institutions, avec un Président qui préside et un Premier ministre qui gouverne réellement, une indépendance des médias et de la justice respectée. Durant le quinquennat, de grandes réformes inscriront ces évolutions dans notre droit : réforme du statut pénal du chef de l’Etat, renforcement des pouvoirs d’initiative et de contrôle du parlement notamment sur les nominations, réforme du Conseil supérieur de la magistrature et des règles de nomination et de déroulement de carrière des magistrats.

Redonner confiance dans la politique suppose aussi le rassemblement.

Nous savons bien – certaines évidences sont bonnes à rappeler – que sans lui, rien n’est possible. Il n’est jamais acquis, il faut donc en permanence le vouloir et le consolider. Rassemblement des socialistes : c’est le préalable.

Rassemblement de la gauche et des écologistes aussi : il est indispensable. Elections municipales, élections régionales, élections cantonales, conquête du Sénat furent le ciment de nos victoires présidentielles et législatives. Celles-ci seront le socle de nos succès futurs. Plus grande est notre force du moment et plus large doit être notre hospitalité à l’égard de la gauche dans sa diversité : dès lors que la solidarité prévaut, le débat est un sain questionnement. Laissons à la droite le caporalisme, cette gouvernance d’un autre âge. Les Français aiment que la gauche discute, pas qu’elle se divise : telle est la ligne de crête que chacun doit respecter.

Nous devons aussi œuvrer au rassemblement des socialistes et des sociaux-démocrates européens.

Si nous considérons que l’Europe vaut mieux qu’un vaste marché sans règles, alors nous devons l’organiser pour qu’elle soit cohérente à l’intérieur de ses frontières et puissante en dehors. C’est un immense chantier pour le Parti socialiste que nous avons engagé ces dernières années. Il supposait de développer des convergences avec nos principaux voisins : nous avons signé un accord programmatique décisif avec le SPD et d’autres devront suivre dans le futur, avec le PSOE espagnol, avec le PD italien ou encore le Parti travailliste britannique.

Autre impératif : doter le PSE d’un socle idéologique. C’est chose faite avec la déclaration de principes  adoptée en 2011. Dans la crise, il fallait concevoir des réponses communes, efficaces et innovantes. Plusieurs sont en passe de voir le jour, malheureusement avec un retard coupable dû à l’immobilisme et au dogmatisme de la droite européenne. Le mécanisme européen de stabilité, la taxe sur les transactions financières, les  « project bonds », à chaque fois, les conservateurs européens écartaient nos propositions d’un revers de main, pour finalement s’y rallier. Nous avons beaucoup d’autres batailles à gagner, faisons progresser ces idées au sein du PSE et notamment lors du congrès de l’automne.

Préparons-nous aussi dès maintenant au grand rendez-vous des élections européennes : il est majeur. Fixons-nous pour objectif l’élaboration, avec nos partenaires, d’un projet commun des socialistes européens : pour la croissance, l’emploi, l’investissement productif et écologique ; pour l’harmonisation fiscale et sociale ; pour la réciprocité commerciale ; pour l’intégration politique fondée sur une nouvelle synthèse entre solidarité et souveraineté. Une telle orientation matérialisée par un document sur lequel pourront se prononcer tous les citoyens de l’Union le même jour aura une force populaire capable de faire refluer le torrent du populisme. Nous présenterons un candidat commun à tous les socialistes européens pour la présidence de la commission européenne [avec, s’il y a plusieurs candidats à départager, des primaires européennes, ce serait un grand moment de démocratie]. Au lendemain de notre Congrès, nous proposerons au PSE que soient organisées des Assises du changement en Europe,  auxquelles chaque formation nationale sera invitée à contribuer et dont la synthèse constituera notre projet partagé pour l’échéance de 2014.

Dans cette perspective, le Parti socialiste français doit être à l’initiative : c’est pourquoi nous proposons que 25 % des moyens du siège national de notre parti soient affectés à ce chantier et, au-delà, à notre rayonnement au sein du PSE. Nos secrétaires nationaux développeront chacun la dimension européenne de leur action en liaison avec le PSE. Nous agirons pour développer le militantisme européen, même si nous pouvons déjà nous réjouir de l’implication du PS : près de la moitié des « activistes » du PSE sont français. Et comme l’argent est le nerf de la guerre, nous proposerons de doubler les moyens du PSE.

Mais il ne peut y avoir de réformes durables et justes sans s’appuyer sur les corps intermédiaires.

La droite les a fustigés et affaiblis, nous voulons les réhabiliter et les remobiliser.

Cela commence par l’écoute, le dialogue, la concertation et la négociation. C’est notre culture autant que la condition de la réussite. Nous, nous sommes heureux de débattre avec les syndicats et les associations, alors que M. Sarkozy les a montrés du doigt, en prononçant des paroles qui n’auraient jamais dû sortir de la bouche d’un chef de l’Etat.

Il est impératif de conforter les acteurs sociaux. En les associant aux grandes orientations sociales du quinquennat – emploi, formation, rémunération, égalité professionnelle, redressement productif, retraites, financement de la protection sociale – avec la conférence de juillet et les négociations qui suivront. En intégrant des représentants des salariés dans les conseils d’administration et dans les comités de rémunération des grandes entreprises. En développant le dialogue social, à tous les niveaux, y compris territorial.

Conférence sociale mais aussi conférence environnementale, consultation sur l’éducation, assises de la recherche, décentralisation : le dialogue est aujourd’hui partout et avec tous syndicats, associations, ONG, collectivités locales. Avec les grands partis politiques, aussi, qui ont été reçus par le Président de la République en amont du sommet du G20 et de Rio+20, et qui le seront à chaque fois que d’importantes décisions devront être prises.

 

 

III – Réussir le changement et l’inscrire dans la durée, c’est préparer les idées et les équipes de demain

 

En 2012, les socialistes sont de nouveau aux responsabilités du pays. Pour la première fois depuis un quart de siècle, l’un des nôtres est le chef de l’Etat. Les questions qui nous sont posées sont nécessairement différentes de celles d’un Congrès en période ordinaire.

En même temps, nous devons rester nous-mêmes. Parce qu’il n’y a pas un comportement valable dans l’opposition et un autre préférable dans la majorité. Parce qu’il n’y a pas à séparer la théorie et la pratique, le dire et le faire. Enfin, parce que les ressorts qui ont permis la reconquête doivent être consolidés pour que réussisse l’alternance.

Entre le parti, le gouvernement et nos groupes parlementaires, le dialogue doit être permanent et reposer sur trois mots d’ordre à faire vivre en un même mouvement : soutenir, agir, innover. Soutenir car nous sommes solidaires de la politique menée par François Hollande et Jean-Marc Ayrault. Agir car la force intellectuelle, militante et territoriale que constitue le Parti socialiste est un atout pour la gauche et pour la France. Innover dans nos réponses aux défis du pays et aux aspirations et aux inquiétudes des Français, et d’abord des catégories modestes et des classes moyennes, ainsi que des producteurs – ouvriers et employés, agriculteurs, professeurs, ingénieurs, mais aussi entrepreneurs, artisans, commerçants.

La mise en œuvre de ce programme est d’autant plus indispensable que la droite s’est engagée, notamment à l’échelon local, dans un dangereux rapprochement avec les thèses du Front national et qu’elle dispose aujourd’hui encore de relais puissants et d’intérêts d’argent que seul anime l’esprit de revanche. Plus que jamais, le socialisme républicain est un socialisme pour la République.

Nous devons mener et gagner la bataille des idées : c’est la condition même d’une alternance réussie.

L’élection présidentielle a marqué l’amorce d’un changement de cycle idéologique. A l’échelle européenne, la nouveauté est particulièrement visible : plusieurs Etats membres ont utilisé la victoire de la gauche dans l’Hexagone pour affirmer leur préférence pour la croissance plutôt que pour l’austérité et s’engager dans le sillon tracé par François Hollande. En France aussi, le changement d’épicentre est manifeste : en quatre dimanches, lors des élections présidentielle et législatives, le rassemblement autour des valeurs de la République et la confiance pour redresser le pays dans la mondialisation l’ont emporté sur la volonté de diviser les Français et d’aligner notre pays sur les canons du conservatisme libéral-autoritaire. Reste une réalité : l’effort doit être conforté et amplifié. En témoigne, en France, le résultat obtenu par le président sortant le 6 mai dernier, dont la campagne, à défaut de programme chiffré, avait pour principaux axes la remise en cause de Schengen et de l’ouverture au monde, la stigmatisation des jeunes, des chômeurs et des fonctionnaires, la confusion orchestrée entre insécurité, immigration et islam. En témoignent aussi les scores du Front National et le fort taux d’abstention aux législatives.

Ces dernières années, la réflexion a été posée au cœur de notre refondation, avec tous ceux qui pensent la société, qui innovent, qui inventent. C’était une autre leçon de 1981 : la gauche n’est elle-même que lorsqu’elle est en résonance avec les forces de la culture et de la création, avec les acteurs de la société. Le miel programmatique ne peut provenir que d’un parti-ruche. Ce fut le lien renoué avec les associations, le mouvement mutualiste et de l’éducation populaire, les chercheurs et les universitaires, les artistes, mais aussi les organisations syndicales et les représentants des entreprises. Ce fut l’apport décisif du Laboratoire des idées. Ce travail collectif – longtemps moqué par la droite ou ignoré par les médias – fut le ciment de nos victoires en 2012. Le préserver, le développer notamment dans sa dimension régionale, est le talisman des victoires futures.

La bataille des idées, c’est la bataille contre la crise et pour l’après-crise. Les politiques publiques mises en œuvre ne se réduisent pas à des actes de résistances : elles posent les jalons d’un rebond. La contribution des revenus du capital à l’effort de redressement n’est pas seulement une source de financement quand les ressources se font rares : elle préfigure un autre partage de la richesse, plus favorable aux salariés. De même, la mise en œuvre de tarifs progressifs de l’eau et de l’énergie est une source immédiate de pouvoir d’achat pour les ménages, mais elle est aussi un levier d’économies pour ces ressources vitales et rares. Reste que dans l’exercice des responsabilités, la temporalité du politique est le présent et bien souvent l’urgence : cette réactivité est exigée à juste titre par nos concitoyens. Il faut donc maintenir le besoin de penser le temps long, de ne pas se laisser capturer par l’instant, et pour y parvenir, disposer de lieux pour anticiper les idées de demain et les débats d’après-demain. Car l’objectif n’est pas seulement de combattre la crise économique, mais de rendre possible le nouveau modèle de civilisation, plus humain et moins marchand, plus soucieux d’être que d’avoir, qui est l’horizon même de notre engagement socialiste et internationaliste. Les enjeux sont connus : l’écologie productive, la science du vivant en même temps que sa préservation éthique, l’aspiration à l’accomplissement individuel dans un cadre collectif et le respect de l’intérêt général, la prise en compte des aspirations sociétales qui ne saurait épuiser la question sociale dans sa totalité, le besoin d’autorité dans une société de libertés, le dialogue entre les cultures et l’universalité des valeurs démocratiques en général et de la laïcité en particulier, etc.

Plus que jamais, le Parti socialiste doit être porteur et apporteur d’idées. En 2012, nous l’avons vérifié : l’intelligence est collective. Convention après convention, forum après forum, nous avons su élaborer ensemble les réponses aux enjeux du présent et du futur. L’adoption à l’unanimité de notre projet a consacré ce travail et offert un socle doctrinal et programmatique dans lequel François Hollande a pu puiser pour bâtir son projet présidentiel. Cet élan doit être désormais prolongé. Nous organiserons au moins une convention nationale chaque année, mobilisant toutes les énergies du parti.

Préparer les idées de demain, mais aussi permettre au Parti socialiste d’être à l’unisson de la société française

Il nous faut nous ouvrir d’avantage encore à la société française. Nous avons su le faire magnifiquement avec nos primaires citoyennes, qui ont été à l’origine d’un vaste mouvement populaire qui nous a accompagné notre candidat jusqu’à la victoire. Un enjeu majeur pour notre Parti, dans les années à venir, sera d’agréger ces millions de femmes et d’hommes autour de nous pour changer la société avec nous. Dans cet état d’esprit il sera recommandé à chacune de nos sections de mettre en place des structures plus souples ayant pour vocation de rassembler les sympathisants des primaires et au-delà afin, notamment, de préparer les prochaines échéances.

Nous sommes un parti de militants et nous voulons le rester : la définition des orientations politiques, la désignation de nos candidats, en dehors du candidat à l’élection présidentielle qui relève de primaire – sont l’apanage de femmes et d’hommes engagés dans une formation politique.

Mais nous devons aussi élargir le cercle de notre famille. Il faut pour cela inventer de nouvelles formes de militantisme pour des femmes et des hommes qui, sans vouloir franchir le pas de l’adhésion, ne demandent qu’à s’impliquer à nos côtés, à condition que nous soyons capables de nous ouvrir à eux. Un Parti ouvert sur la société, c’est un Parti qui consulte et associe ses sympathisants en amont des décisions ; c’est un Parti qui développe des consultations publiques par Internet, pour soumettre nos propositions aux Français ; c’est un Parti qui organise de grands débats de société auxquels tous les citoyens sont associés ; c’est un Parti qui investit les réseaux sociaux et donnant à chaque militant les moyens d’y prendre part pour se faire ambassadeur de nos idées ; c’est la pérennisation de nos porte-à-porte en dehors des périodes de campagne ; c’est aussi demander aux militants de s’engager dans tous les corps intermédiaires de la société – syndicats, associations, ONG…- et dans les entreprises.

Si nous voulons ramener à la politique les Français qui s’en sont éloignés, il nous faut aussi « repolitiser le débat », au bon sens du terme. Nous devons convier les Français à de grands débats qui répondent bien sûr à leurs attentes individuelles du quotidien – sur l’emploi, le logement, la santé, sur l’éducation, la sécurité…-, mais qui permettent aussi de réfléchir et tracer avec eux à notre avenir commun : débats sur nos valeurs, sur le vieillissement et la fin de vie, sur notre relation au vivant, sur l’organisation de nos villes et de nos territoires pour bien vivre ensemble, sur notre vision du monde et la solidarité avec les pays qui attendent beaucoup de la France comme l’Afrique et cette belle ambition de construire un ensemble euro-africain…. Nous l’avons vérifié dans tous nos contacts avec les Français, quand on place le débat à ce niveau là, les Français sont au rendez-vous. A l’écoute de la société, ouverts sur la société, ancrés dans la société, projetant la société dans l’avenir : voilà comment nous réconcilierons les Français et la politique !

Etre à l’unisson de la société française, c’est préparer une nouvelle génération de responsables politiques représentative de la diversité de notre pays. C’est l’enjeu de la démocratie représentative même : que le Parti socialiste, sans verser dans le mythe du parti-miroir, soit à l’image de la société dans sa diversité. A cet égard, la question du non-cumul des mandats est fondamentale.

C’est l’une des conditions du renouvellement des générations et de l’ouverture des fonctions électives aux citoyens dans toute leur diversité. Si nous avons accompli un grand bond en avant en matière de parité aux dernières élections législatives, si nous avons progressé dans la représentation de la diversité, nous le devons aux règles de non cumul que nous nous sommes appliquées à nous même au sein de notre parti, avant même le vote d’une loi. Il suffit de regarder a contrario ce qui s’est passé à droite pour s’en convaincre.

Nous voulons aller jusqu’au bout des engagements pris devant les Français eux-mêmes issus de décisions prises par les militants. En appliquant de manière déterminée nos règles internes de non-cumul et en les étendant par la loi à tous les élus de la République. En mettant en œuvre de manière tout aussi déterminée un véritable statut pour les élus car la limitation en nombre et dans le temps des mandats ne saurait se traduire par une insécurité sociale et financière pour les élus dont le dévouement et l’engagement sont souvent synonymes de sacrifices personnels. En introduisant une part de proportionnelle aux élections législatives. En durcissant les sanctions contre les partis qui n’appliquent pas la parité – autrement dit, en les privant d’une part de la dotation publique plutôt qu’en leur permettant, comme c’est le cas aujourd’hui, de s’exonérer de la parité en payant des amendes. En modifiant également le mode de scrutin des conseillers généraux afin de permettre là aussi la progression de la parité et du renouvellement.

Le renouvellement devra aussi concerner les responsables de notre parti en décidant de nouvelles règles l’encourageant : par exemple, en limitant dans le temps le nombre de mandats de 1er secrétaire national ou de 1er secrétaire fédéral ou en limitant les cumuls de responsabilité de 1er secrétaire fédéral avec certains mandats électifs.

Enfin, préparer les équipes de demain c’est faire du secrétariat national un vivier constitué de jeunes élus locaux et parlementaires.

Consolider notre réseau d’élus socialistes et républicains, le premier de France. De la même façon que la victoire de 1981 avait été rendue possible par les conquêtes municipales de 1977, l’alternance de 2012 a été le débouché des magnifiques succès territoriaux engrangés par les socialistes et leurs partenaires au cours de la décennie qui a précédé. Ne laissons jamais dire par la droite que la gauche a obtenu ces responsabilités, nationales et locales, par « effraction » ! Elles sont le résultat du vote des Français et le fruit du travail de nos élus locaux, de la proximité et de l’efficacité qui caractérisent leur action au quotidien.

Pour une large part, le succès du redressement dans la justice engagé par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault réside dans la capacité à s’appuyer sur  le réservoir d’énergies et de talents que constituent nos territoires. Elus locaux bien sûr, mais aussi acteurs économiques et sociaux, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de la vie associative, culturelle et citoyenne. C’est l’un des acquis des réflexions que nous avons engagées au cours des dernières années : le retour d’une puissance publique à la fois stratège, régulatrice et performante revient à réhabiliter le rôle et la place de l’Etat, mais aussi à ne pas séparer ses décisions et son actions de celles que mettent en œuvre les collectivités territoriales, et d’abord les Régions.

La Fédération nationale des élus socialistes et républicains (FNESR) doit jouer un rôle central et permanent dans l’agenda du parti, elle le joue, mais il est possible de faire mieux encore. Le Forum des territoires, au sein de la FNESR, doit devenir un rendez-vous traditionnel dans notre agenda collectif et s’ouvrir aux militants autant qu’aux élus.

Une université permanente de la formation, ouverte aux sympathisants et fonctionnant sur le modèle de l’éducation populaire, doit être créée dans chaque région afin d’accueillir et d’accompagner les élus dans leurs mandats.

Un laboratoire des territoires sera être créé en son sein du Forum des Territoires pour permettre de mutualiser les bonnes pratiques et d’échanger les expériences, d’organiser les parcours d’élus dans le cadre du non cumul des mandats et de la mise en œuvre de l’indispensable statut de l’élu.

Pour appliquer ce programme aussi ambitieux qu’indispensable, une réflexion devra s’engager au lendemain du Congrès pour une plus grande coordination entre les fédérations d’une même aire régionale, voire une coopération inter-régionale. Chacun en sait, en sent, l’importance. Pas seulement pour moderniser notre parti, mais surtout pour faire converger les analyses – et les intérêts – à propos des grands projets d’infrastructures ferroviaires, portuaires ou aéroportuaires, les outils de financement des entreprises et de l’innovation, la structuration de réseaux de formation et d’enseignement supérieur, la synergie entre plateformes dédiées à la recherche, l’organisation de manifestations culturelles et touristiques communes renforçant l’attractivité des territoires. Dans un contexte de ressources publiques rares, une telle mutualisation est un gage de performance.

Enfin, nous devons préparer dès maintenant le rendez-vous électoral de 2014. Parce que les Français ont besoin de nous dans les territoires. Parce que les échéances intermédiaires sont toujours plus difficiles pour les partis politiques en place. Les dirigeants de l’UMP en ont fait un temps de revanche face à la gauche, nous devrons en faire un moment de confiance renouvelée dans notre action locale comme nationale. Cette échéance majeure devra être une priorité du Parti socialiste dès après notre Congrès. A l’évidence les prochaines échéances locales se tiendront dans un contexte bien différent des précédentes. C’est pourquoi, dès maintenant, il nous revient de les préparer avec sérieux et constance. C’est pourquoi, des moyens – notamment au travers une refonte de notre système de péréquation – devront être alloués aux stratégies de conquête dans l’ensemble de nos territoires.

 

 

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Les ressorts qui ont rendu possible l’alternance – réflexion, réconciliation, rénovation- sont aussi ceux qui permettront au Parti socialiste de réussir dans l’exercice du pouvoir. Nous réussirons l’alternance comme nous l’avons conquise.

Telle est l’ambition de cette contribution générale et de leurs signataires. Parce que nous avons conscience des défis qui s’ouvrent à la gauche en France et en Europe. Parce que nous savons que le changement ne vaut d’être conquis par les urnes que s’il se traduit dans des réformes et dans la vie quotidienne des Français. Parce que l’UMP, si elle se déchire aujourd’hui, se retrouvera pour prendre sa revanche en 2014, convaincue que la gauche n’est et ne sera jamais légitime. Parce que nous refusons de laisser l’extrême droite gagner du terrain d’élection en élection. Parce que, plus que jamais, nous sommes persuadés de l’impérieuse nécessité de bâtir dans les prochaines années cette nouvelle synthèse politique entre les questions sociale, démocratique et écologique qui fera le socialisme du 21ème siècle. Ainsi armé, le Parti socialiste pourra constituer l’axe central d’une gauche qui dure.

C’est pourquoi nous voulons que notre Congrès de Toulouse soit celui du changement en actes. Pour cela, nous proposons aux militantes et aux militants socialistes une ambition : réunir et réussir, réunir pour réussir.

 

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