Le Parti Socialiste est enfin en marche vers la victoire!

 (jacques Dominioni))

Politiques 05/04/2011 à 00h00 (mise à jour à 09h19)  LIBERATION

PS : Aubry livre un projet clés en main

Présenté hier aux principaux responsables du parti, le programme socialiste pour la présidentielle de 2012 détaille une centaine de propositions. Que le vainqueur de la primaire devra appliquer.

Tonino serafini Jacky durand Véronique Soulé Éric Favereau Charlotte Rotman

«Le changement.» Ce pourrait être un slogan de campagne. C’est le titre tout rose du projet des socialistes pour 2012. A moins de 400 jours du premier tour de la présidentielle, la direction du PS a compilé, élagué, affiné ses travaux et propositions faites depuis deux ans pour aboutir à une première mouture d’un programme à disposition du futur candidat : plus de cent propositions, une centaine de pages divisées en trois chapitres – «Redresser la France», «Changer nos vies» et «Rassembler les Français». «Il ne va pas suffire de faire quelques replâtrages […] pour changer la situation des Français», a prévenu Martine Aubry hier sur France 2, dénonçant avec un accent ancré à gauche un «système» en «bout de course» responsable du «déclassement» et du «déclin de la France».

Dans l’après-midi, au siège du PS, à Paris, la première secrétaire avait présenté le texte à ses camarades hauts responsables, réunis en conseil politique, dont François Hollande, Ségolène Royal, Laurent Fabius, Pierre Moscovici… Derniers ajustements et réclamations avant un bureau national extraordinaire ce matin et une adoption prévue par le conseil national samedi. Le document, amendé, sera ensuite envoyé aux adhérents le 11 avril. Ce qui laissera un bon mois aux militants pour en débattre avant un vote le 19 mai et une convention nationale le 28 mai. Au temps du projet succédera alors celui de la primaire ouverte jusqu’en octobre. Chaque candidat devrait se retrouver dans ce projet (lire page 6), mais il est conçu pour laisser assez de marges à chacun pour se distinguer lors du choix du représentant socialiste par les sympathisants de gauche : Arnaud Montebourg et sa «démondialisation», François Hollande et son «contrat de génération»… A défaut de leadership, les socialistes auront au moins des arguments – audibles – à faire valoir à la droite.

Emplois jeunes

Pour les 18-25 ans

«Vieille recette» pour la droite, «mesure efficace» pour la gauche: les emplois jeunes font leur retour. 300 000 «emplois d’avenir», au statut juridique identique aux contrats mis en place en 1997, sont prévus sur la législature. CDD d’un an, renouvelables pendant cinq ans, ils seraient réservés aux jeunes âgés de 18 à 25 ans, payés au minimum au Smic et travaillant dans le secteur non-marchand (associations, collectivités locales…). Avec un double ciblage : les jeunes situés en zone urbaine sensible (ZUS) et le secteur du développement durable. Ces contrats seraient également «accompagnés d’un volet formation plus appuyé que pour les emplois jeunes, explique-t-on rue de Solférino, notamment dans le domaine du diagnostic énergétique des habitations». Coût estimé : 1,2 milliard pour 150 000 premiers contrats. Soit, en vitesse de croisière, un coût annuel de 2,5 à 3 milliards pour les 300 000 emplois d’avenir.

Impôts

Un prélèvement à la source

Le PS promet une «grande» réforme fiscale s’il revient au pouvoir avec l’objectif de rendre cette dernière à la fois plus transparente et plus juste. La mesure phare ? Une fusion de l’Impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) avec la Contribution sociale généralisée (CSG). En combinant la base élargie de la CSG qui touche – mais de manière proportionnelle – toutes les formes de revenus avec l’assiette plus réduite mais progressive de l’IRPP, il s’agit de créer un «nouveau grand impôt progressif sur le revenu prélevé à la source». Autrement dit, d’imposer tous les revenus sur la base d’un barème unique s’appliquant de manière identique au travail et au capital. Cette réforme s’accompagnera d’une révision drastique de l’ensemble des niches fiscales et sociales afin de dégager 50 milliards de recettes annuelles supplémentaires à partir de 2015 ou 2016. «Il n’y aura aucune augmentation générale des impôts, ni de la TVA ni de la CSG ou de l’impôt sur le revenu, explique un des auteurs du programme, c’est la conjugaison de la chasse aux cadeaux fiscaux avec la mise en place d’un système plus juste qui permettra d’augmenter considérablement le rendement de l’impôt.» Alors que l’économiste Thomas Piketty dans son livre la Révolution fiscale invite la gauche à s’engager sur la voie d’une réforme à effet immédiat, le PS plaide pour une mise en place «plus progressive», sur la durée d’une législature. «C’est une divergence de méthode et non de fond, explique un fiscaliste du PS. Pour nous cette fusion devra avancer par étapes. Piketty raisonne dans un monde idéal et sans contraintes, c’est séduisant mais pas réaliste politiquement.»

Salaires

De l’exemplarité et plus d’égalité

Sujet sensible après la crise économique : les salaires des dirigeants d’entreprise. Le PS souhaite limiter de 1 à 20 l’éventail des rémunérations dans les sociétés dont l’Etat détient une participation. Même lorsqu’il est minoritaire ? «Il ne pourra alors que le suggérer, admet Alain Vidalies, secrétaire national du PS au travail. L’idée étant que cette limitation devienne progressivement une référence.» Et pour donner un coup de pouce au destin, les socialistes proposent de généraliser la présence des salariés dans les conseils d’administration, mais aussi au sein des comités de rémunération. Quant au projet, caressé en décembre, d’instaurer un éventail des rémunérations dans les grandes entreprises 100% privées, à déterminer en codécision entre l’assemblée générale des actionnaires et le comité d’entreprise (c’est-à-dire les représentants des salariés), le sujet semble encore faire débat. Pour les écarts de salaires hommes-femmes, par contre, le PS se donne l’objectif de diviser les différences par deux en cinq ans, en conditionnant les exonérations de cotisations sociales à la conclusion d’un accord salarial «opérant ce rattrapage».

Retraites

Retour à 60 ans

La position du PS demeure identique à celle du débat en 2010 sur le projet de loi du gouvernement, qui avait repoussé à 62 ans l’âge légal de départ: retour à 60 ans, prise en compte de la pénibilité par la validation d’annuités spécifiques, et allongement éventuel de la durée de cotisation à partir de 2025 «en cas de nouveaux besoins» de financement. Avec, comme garde-fou, que tout allongement de la durée de cotisation soit «limité à la moitié des gains d’espérance de vie», contre les deux tiers aujourd’hui. L’ensemble de ces mesures seraient financées par l’augmentation des cotisations sociales et par de nouveaux prélèvements sur les revenus du capital, pour un total de 37 milliards d’euros à l’horizon 2025.

Nucléaire

Trouver une issue

«Sortir du tout nucléaire» ou «sortir – progressivement – du nucléaire»? Tout est dans le «tout». La première formule devrait être retenue dans le texte du PS. Et elle hérisse Europe Ecologie-les Verts, qui fait de la seconde une condition sine qua non de sa participation à un gouvernement de gauche. «Si cela veut dire baisser la part du nucléaire dans le mix énergétique, ce n’est rien de plus que la déclaration de Sarkozy au Grenelle, tempête Yannick Jadot, directeur de campagne d’Eva Joly. Cela voudrait dire que le PS n’a pas compris les enjeux énergétiques et la catastrophe de Fukushima. J’espère qu’en interne, les modernes gagneront contre les conservateurs.» Entendez Martine Aubry et Harlem Désir, les numéros 1 et 2 du PS, qui ont évoqué une sortie du nucléaire. Versus François Hollande, pour qui «un candidat socialiste ne peut prétendre sortir du nucléaire». Une chose est sûre : le PS bouge, lui qui était encore pro-atome avant Fukushima. «Tout le monde revisite ses convictions. A part Hollande, les pro-nucléaire sont dans un état de sidération, un peu comme les communistes après la chute du mur», note Laurence Rossignol, secrétaire nationale à l’environnement. Pour elle, «rompre avec le tout nucléaire, c’est une rupture idéologique, c’est le premier acte. Et préparer l’après-nucléaire, c’est le chantier du XXIe siècle».

Loyers

Des prix encadrés

La cherté des loyers est devenue une préoccupation quotidienne. Et qui pèse dans les budgets des ménages. Le PS qui «entend parler des vrais problèmes des Français» (dixit Aubry) a inscrit dans son programme, le principe d’un encadrement. «L’idée est d’arrêter la politique du laisser-faire», souligne Nathalie Perrin-Gilbert, secrétaire nationale chargée du dossier, pointant, «l’incroyable dérive des loyers au cours des dix dernières années». L’encadrement est en rupture avec la droite au pouvoir, mais aussi avec les politiques menées jadis par les gouvernements de gauche qui avaient laissé libre cours aux loyers à la relocation. Aujourd’hui, la flambée du coût du logement et les dérives d’un marché débridé, remettent au goût du jour la nécessité d’une régulation publique. L’encadrement des loyers devient du coup un thème fort du clivage gauche-droite. Mais la mise en œuvre reste à préciser. Notamment envers les propriétaires qui ne pourront plus augmenter leur loyer à l’occasion d’un changement de locataire. D’aucuns au PS considèrent que les tarifs locatifs ne devront pas dépasser le prix moyen du mètre carré constaté localement pour contrecarrer les loyers excessifs.

Police

Plus de proximité

Les socialistes veulent mettre «du bleu» dans la rue parce que la sécurité publique est leur priorité absolue et qu’elle fut «le secteur le plus sinistré du ministère de l’Intérieur» sous Nicolas Sarkozy, explique Jean-Jacques Urvoas, secrétaire national du PS à la sécurité. Le parti entend s’inspirer «du meilleur de la police de proximité», inventée par la gauche à la fin des années 90 et enterré avec fracas par Nicolas Sarkozy en 2003. Mais pas question de revenir à la version initiale de la «pol prox» qui était censée couvrir tout le territoire et fut coûteuse en effectifs. Pour mettre le paquet sur la sécurité publique, le PS projette le recrutement de 10 000 policiers et gendarmes sur cinq ans, dont 1 000 la première année qui seront affectés directement dans des «zones de sécurité prioritaire». Les socialistes souhaitent coller au plus près du terrain de la délinquance en mettant en œuvre des «stratégies de sécurité locales» définies avec les élus, les commissaires et les commandants de groupement pour la gendarmerie. Pour mesurer l’évolution de la sécurité, le PS entend s’appuyer sur la mesure du service rendu à la population (efficacité, dialogue, rapidité…). Ce qui serait une vraie révolution quand on sait que les statistiques de la délinquance reposent aujourd’hui largement sur des chiffres collectés par les policiers et les gendarmes eux-mêmes. En matière de justice, 500 magistrats et greffiers devraient être recrutés afin «qu’elle soit en mesure de fonctionner dans des délais raisonnables et garantir l’effectivité, la proximité et la rapidité de la sanction».

Ecole

Des projets pour tous les niveaux

Seuls trois enfants d’ouvriers sur dix atteignent la terminale : pour assurer une réelle égalité des chances, le PS propose de se concentrer sur «les fragilités les plus graves du système», c’est-à-dire le primaire. Il promet de rendre l’école obligatoire à 3 ans et de l’ouvrir aux 2 ans. Pour que chaque enfant en sorte en sachant «lire, écrire, compter, cliquer», il propose de «renforcer l’encadrement», donc de recruter des profs. Le PS veut par ailleurs revenir sur la semaine des quatre jours – unanimement dénoncée – remplacée par «cinq jours éducatifs» et sur l’assouplissement de la carte scolaire, qui a condamné les établissements ghettos. Nettement plus prudent que Ségolène Royal qui voulait mettre les profs au travail, le PS parle d’ouvrir «les chantiers des missions et de l’organisation» de leur travail, ainsi que de «revalorisation». Il promet aussi de revenir sur l’un des fiascos du sarkozysme : la réforme de la formation des profs. Enfin, dans le supérieur, il créera une «allocation d’études pour les jeunes en formation» qui devrait leur permettre d’être autonomes. Elle sera sous conditions de ressources et regroupera les aides existantes – les bourses mais aussi l’aide au logement qui était accordée à tous. La loi sur l’autonomie des universités (LRU), qui avait suscité une vaste mobilisation, sera «réformée».

Santé

Des médecins pour les déserts

Apparemment fortes, deux mesures sont prévues pour la médecine de ville. La première concerne la mise en place d’un dispositif pour contraindre les médecins à s’installer dans des régions où les professionnels de santé sont trop peu nombreux. En clair, combattre ces déserts médicaux et pour cela, le PS entend s’attaquer au principe de la liberté d’installation. Seconde mesure : «Une mutation profonde des modes de rémunération des médecins généralistes, par l’introduction du paiement au forfait.» Comment sortir, en effet, du paiement à l’acte, qui est par nature inflationniste ? Depuis près de vingt ans, les experts réfléchissent pour trouver un autre mode de financement de la médecine de ville. La proposition du PS de favoriser le paiement au forfait entre dans cette logique. On peut se demander si ces mesures n’interviennent pas trop tard : ainsi aujourd’hui, seul un médecin sur dix s’installe en libéral, les autres allant vers des activités salariées. C’est toute la médecine libérale qui risque de devenir… un désert médical.

Famille

Plus de modernité

DSK avait été le premier, en 2004, à se positionner sur le mariage et l’adoption par des couples homosexuels : «Pour moi, c’est oui». Même Ségolène Royal, plutôt réticente au départ, s’était ralliée à l’idée lors de la dernière campagne présidentielle. Le PS proposera donc l’ouverture du mariage au couple de même sexe ainsi que la reconnaissance de leur parentalité comme en Belgique, en Espagne, aux Pays-Bas, dans les pays scandinaves, etc. En 2007, les députés socialistes avaient déjà déposé une proposition de loi sur ces deux questions, sorte de gage que le parti ne laissera pas tomber ces revendications. Pour le PS, c’est un excellent moyen de se montrer plus moderne que la droite empêtrée – à quelques exceptions près – dans des schémas familiaux classiques et souvent tétanisée par l’homosexualité.

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