Alliot-Marie et le grand désordre de la sarkozie

M’enfin, comme dit le président de la République, c’est pourtant simple. Et il l’avait déjà expliqué, haut et fort, face caméra, interviewé par David Pujadas le 12 juillet 2010: « Des ministres ont commis des indélicatesses ou des maladresses. Je le leur ai dit. Ils en ont immédiatement tiré les conséquences. »

 Il s’agissait alors de justifier les limogeages tardifs d’Alain Joyandet, pour cause de voyage en jet privé (déjà !), et de Christian Blanc, pour cause de cigares payés par les contribuables.

Et maintenant Michèle Alliot-Marie, ses amitiés tunisiennes et son escapade dans un jet privé du clan Ben Ali… Du torrent de fausses explications, erreurs et approximations de la ministre des affaires étrangères déversé à l’Assemblée nationale, puis sur Canal+, puis au 20 heures de France-2 , ne retenons que cet accablant propos de celle qui est la numéro 2 du gouvernement Fillon : « Je n’ai pas pensé à mal. »

C’est une ligne de défense désespérée et désespérante parce que fausse. Car plus la lumière se fait sur le séjour tunisien de la ministre, ses liens passés avec ce pays, ses dirigeants, ses hommes d’affaires, plus il apparaît qu’à travers elle, la France a été engagée jusqu’à la fin dans un soutien actif au régime de Ben Ali. Michèle Alliot-Marie a donc passé cinq jours, fin décembre et début janvier en Tunisie. Le 7 janvier, elle a rencontré Kamel Morjane, alors ministre tunisien de la défense. Pendant tout ce temps, les directions du Quai d’Orsay l’alimentaient de notes sur la Tunisie, même si l’ambassadeur de France dans ce pays (lui a été limogé mercredi) persistait à croire qu’il ne se passait rien .

Michèle Alliot-Marie n’aurait donc jamais évoqué les émeutes débutées le 17 décembre – et non « après mon séjour », comme elle l’a affirmé –, émeutes tournant très vite à l’insurrection dès la fin du mois de décembre. Comment la croire, alors qu’au vu de cet agenda tunisien qui se dévoile, ses propos du 11 janvier devant l’Assemblée nationale prennent bien tout leur sens ? « Nous proposons le savoir-faire de nos forces de sécurité », avait-elle alors déclaré à la stupéfaction de la plupart des parlementaires.

Visite de Nicolas Sarkozy à Tunis en avril 2008.
Visite de Nicolas Sarkozy à Tunis en avril 2008.© (dr)

Une telle proposition a-t-elle été faite à la seule initiative de la ministre ? Ou l’Elysée, Claude Guéant et Nicolas Sarkozy en l’occurrence, en étaient-ils informés ? Difficile de penser qu’ils ne l’étaient pas quand on sait le tropisme du secrétaire général de l’Elysée pour ces pays (il a la mainmise sur les pays du Maghreb et la Libye). Et si l’on se souvient que Nicolas Sarkozy avait songé à confier la vice-présidence de l’Union pour la Méditerranée à Ben Ali avant de la proposer à… Hosni Moubarak, qui avait accepté.

 « Moi, en ce qui me concerne, je ne serais pas partie en Tunisie pour mes vacances », a confraternellement déclaré la ministre Nadine Morano, mettant ainsi sur la place publique l’accablement qui a saisi une partie de la droite face aux agitations de la ministre des affaires étrangères pour ne pas couler à pic.

Cette entrée a été postée dans International. Mettre en favoris le permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


*