Rénovation du PS, analyse de Gérard Grunberg

«Le PS a lancé un processus assez révolutionnaire»

Interview

Directeur de recherche au CNRS et à Sciences-po, Gérard Grunberg analyse la portée du vote des militants socialistes: «l’adaptation à la logique de la Ve» avec les primaires, «un choix courageux mais risqué» sur le non-cumul.

 

Recueilli par LAURE EQUY

Martine Aubry, prononce le discours de clôture des journées parlementaires du PS à Toulouse, jeudi, également jour de la consultation des militants sur la rénovation. (© AFP Eric Cabanis)

Quelle conclusion peut-on tirer du taux de participation à la consultation de jeudi, estimé à 46%?

On a deux phénomènes totalement différents. Les militants à jour de cotisation (64.000, ndlr) ont apparemment massivement voté et d’autres, qui se sont déplacés, en ont probablement profiter pour règler leur cotisation. Ils se sont donc bien mobilisés et le scrutin a été populaire, les militants appréciant d’être consultés sur les questions importantes. Mais par ailleurs, le PS peut-il encore revendiquer 200 000 militants? On ne le sait pas. Et c’est, sans doute, le pendant négatif: on peut regretter que le parti n’ait pas su garder les adhérents qu’il avait jadis.

Le résultat légitime-t-il Martine Aubry?

On doit admettre qu’il s’est passé quelque chose d’important jeudi soir. Alors qu’elle n’avait pas fait des étincelles depuis le congrès de Reims, Martine Aubry a su redresser la barre à la Rochelle. Elle qui n’était pas tellement favorable à des primaires, a su assumer ce dispositif, le défendre, le faire adopter par le conseil national et immédiatement faire valider ce choix par les militants. Elle asseoit sa crédibilité, du moins jusqu’aux régionales…

Justement, comment interprétez-vous le résultat obtenu sur ce mode de désignation du candidat à la présidentielle, approuvé à 68%?

Il y avait un risque à demander aux militants de se dessaisir du pouvoir de désigner eux-mêmes leur candidat. Mais seuls eux pouvaient prendre cette décision. Il y a eu une évolution des esprits, à la fois sur la démocratie et le rapport du parti à l’opinion publique. Le PS reconnaît que, dès lors que la présidentielle est l’élection centrale, l’appareil n’a pas le monopole du processus de désignation du candidat.

Et pour la limitation du cumul des mandats, qui  a recueilli 72% de «oui»?

On pourrait être surpris qu’au sein d’un parti d’élus, une telle majorité se soit exprimée contre le cumul des mandats. A terme, il s’agit d’une bonne mesure du point de vue du fonctionnement démocratique de la vie politique. Mais également d’un facteur de division interne, même si la contestation n’est pas officielle. L’opération représente une rupture fondamentale, personne n’a jamais osé s’y atteler. Là aussi, c’est courageux mais risqué.

Les militants ont voté et validé la rénovation proposée par la direction. Désormais, tout reste à faire…

Certains ont traîné des pieds mais les socialistes ont lancé un processus assez révolutionnaire, notamment le fait de s’adapter à la logique de la Ve République, avec les primaires. On ne doit pas sous-estimer la portée de ce vote. Après, se pose effectivement la question de la mise en oeuvre. Là, ils jouent à quitte ou double. L’organisation des primaires, par exemple, est extrêmement délicate. Il faudra régler les questions matérielles (contrôles, listes, points de votes), décider un calendrier, etc. Rater cela aurait des conséquences très lourdes.

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